25 mars 2007

Jacob ou l'improbable salut, par Funny Friend

Chers lecteurs, voici une modeste contribution sur le cas Jacob produite à l'invitation de l'ami Thibaut. Je suis navré, je ne suis pas philosophe mais simple étudiant en M2 de Lettres Classiques. Pour ne pas vous décevoir je préfère vous dire dès maintenant que mon texte sera relativement court et qu'il ne comportera pas autant de doctes références que les articles de mes compères Elise et Thibaut. Je tiens à vous dire aussi qu'il vaut mieux ne pas s'arrêter au ton pseudo-psychanalytique et dérisoire de ma production cela fait partie du jeu.
L'épisode de Jacob se trouve au livre de la Genèse du chapitre 25, verset 19 au chapitre 50. Il comprend quelques excursus comme par exemple l'épisode de son fils Joseph. J'ai choisi d'intituler ce post Jacob ou l'improbable salut car vous allez voir que la présence, à mon avis, de ce patriarche dans la Bible tient a priori du prodige.


Oui, la formidable ascension d'Israël quand on commence la lecture est loin d'être flagrante et prévisible. Dressons en quelques mots le tableau. Jacob est le fils d'Isaac et de Rebecca et le frère jumeau d'Esaü. Freud disait : « l'enfant est le père de l'homme ». Et bien observez un peu toute les casseroles psychologiques et constitutives de la personne que se trimbalait Jacob dès la plus tendre enfance. 1°) Un frère jumeau qui a tout pour réussir (25,27 : Esaü était un chasseur expérimenté qui courait la campagne; Jacob était un enfant raisonnable qui habitait sous les tentes.). 2°) Un père qui bien évidemment préfère s'occuper de l'aîné bouru plutôt que de l'autre (25,28 : Isaac préférait Esaü, car il appréciait le gibier.). 3°) Une mère castratrice (25,28 : Rebecca préférait Jacob ; 27,8 : « Maintenant mon fils, écoute-moi et fais ce que je t'ordonne » ; 27,42-43 : On informa Rebecca des propos d'Esaü, son fils aîné. Elle fit appeler Jacob, son fils cadet, et lui dit : « Voici que ton frère Esaü veut se venger de toi en te tuant. Maintenant, mon fils, écoute moi ; debout ! Fuis chez mon frère Laban à Harrân. »). A ce stade déjà on se demande comment Jacob a fait pour s'en sortir ; ce qui a fait de lui un héros de l'Ecriture et non la vedette de « Priscilla, folle du désert ». Et ce n'est pas fini ! Cela continue comme ça sur encore trois ou quatre chapitres : un oncle qui ne pense qu'à exploiter son neveu pour faire marcher la boutique et le cheptel ; deux femme aussi jalouse l'une que l'autre ; la bien-aimée est stérile et toutes deux jouent à ce qu'on pourrait appeler « la course au bébé » pour avoir le privilège d'être la mère de l'héritier ou alors, vu le nombre pléthorique d'enfants, peut-être est-ce pour avoir l'honneur de candidater à « une famille en or » ??


Alors, voilà, avec tout ce passif comment je fais pour être à la hauteur d'Abraham et d'Isaac ? Comment je fais pour devenir Père du Peuple Elu ? C'est simple, je passe mon Bac ou plutôt le Yabboq. Et là je croise un ange et tout est réglé ! Bon, plus sérieusement, qu'est-ce que recouvre cette fameuse rencontre avec, en fait, Dieu lui-même ? Le passage du Yabboq c'est quand tout bascule, quand je prend conscience de toutes mes casseroles, de tous les squelettes du placard et où seul (32, 25 : Jacob resta seul) je décide de les affronter. L'homme ou l'ange c'est Dieu qui est là à nos côté pour nous soutenir dans ce terrible combat avec soi-même voir même pour stimuler le combat, et oui, il est tellement plus simple de vivoter ou de pratiquer la politique de l'autruche parfois (j'invite les lecteurs de ce blog qui ne serait pas des croyants convaincus à remplacer le mot « Dieu » par une réalité tout aussi proche, Sagesse, Sophia, Philosophie...). C'est très dur (32, 27 : [Jacob] lui dit : « Laisse-moi car l'aurore s'est levée »- « Je ne te laisserai pas, répondit [l'ange], que tu ne m'aies béni »), on est blessé tant moralement que physiquement ( 32, 26 : il heurta Jacob à la courbe du fémur qui se déboîta ; 32, 33 : Il avait en effet heurté Jacob à la courbe du fémur, au muscle de la cuisse) mais c'est là la condition sine qua non pour vivre une vie en homme debout quoiqu'il advienne de nous, pour garder et construire sa dignité humaine. De ce combat mené en vérité, on sort irrémédiablement vainqueur. C'est un autre moi, guéri, réconcilié avec soi-même, littéralement changé, converti qui se relève : « On ne t'appellera plus Jacob, mais Israël, car tu as lutté avec Dieu et avec les hommes et tu l'as emporté ».

Après ça je deviens plus fort, plein de courage, je gagne l'armure des justes et je peux :

1°) me réconcilier en profondeur avec mon frère (chap. 33 ; verset 15 : Il me suffit de trouver grâce au yeux de mon seigneur. (désigne ici Esaü) ),

2°) être indulgent avec papa et maman tout en disant à l'un que j'existe ( 35, 29 : Isaac expira, il mourut et fut réuni aux siens, âgé et comblé de jours. Esaü et Jacob l'ensevelirent) et à l'autre que j'ai passer l'âge d'être materné (désolé mais nulle trace de ceci pour Jacob...) et aux deux que je suis désormais prêt à assumer moi-même ma propre famille, ou plus simplement ma propre vie,

3°) devenir pater familias et renvoyer charitablement mais sûrement mes deux ou quatre femmes à leur place (désolé pour cet excès machiste qui ne me ressemble guère mais qui dit une part de la vérité et qui surtout viendra réjouir mes congénères vires). La fin de l'épisode de Jacob des chapitres 37 à 50, outre tout ce qui concerne Joseph, n'est que la mise en évidence de tous les fruits reçus après Yabboq. Jacob a réussi à être un bon père de famille, un guide pour le peuple que Dieu s'est choisi (nb : dès le passage du Yabboq Dieu parle à Jacob, signe qu'une transmission peut désormais avoir lieu, que Jacob peut recevoir l'héritage de ses pères, qu'il a pris sa place dans sa propre filiation tout comme dans la filiation divine) même si les circonstances de la vie font qu'ils ont quitté Canaan... Véritablement guide car si jusqu'ici Dieu s'était trouvé des interlocuteurs individuels, à partir de l'Exode (le livre suivant la Genèse qui se conclue finalement au chapitre 50) c'est vers tout le Peuple d'Israël qu'il dirige sa Parole.

J'avais commencé ce post en qualifiant le salut de Jacob d'improbable a priori. Improbable à vue humaine c'est certain. Vous conviendrez qu'il partait de loin et que ça peut paraître limite crédible !! Et pourtant c'est ce type d'histoires qui me ravi dans la Bible parce que tellement humaines et tellement vraies ! D'ailleurs à y regarder de plus prêt ce n'est peut-être que ça la Bible : une succession d'histoires de paumés qui ont l'honnêté de reconnaître leur misère, que Dieu prend en pitié et qu'Il aide à s'en sortir !!

PAIX ET JOIE.

Ill: Gauguin, La vision après le sermon ou la lutte de Jacob avec l'ange, 1888, National Gallery of Scotland , Edimbourg

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci chère amie de republier ce bel article. Avant que je ne sois voué aux gémonies pour mon manque de rigueur, je préfère relever moi-même une faute de latin commise par inadvertance. Il faut lire : "...mes congénères viri" et non "vires" bien que par nature homme et force soient si inextriquablement liés !!
Que Dieu vous bénisse !

Ciao tutti.
FF.

Sémiramis a dit…

Bravo encore mon cher FF, pour cet article excellent! Tu rejoins mes intuitions de façon synthétique et... funny!

Merci de ce travail d'écriture.

Anonyme a dit…

Chere Funny Friends
il est sur que tu n'a pas le talent de my sister mais ce nest vraiment pas mal du tout!'est vraiment FUNNY !!!!!!!!!!

Sémiramis a dit…

Pauvre FF! Son talent est incomparable, pourtant!

Je constate avec plaisir que le culte de la personnalité éliséenne fonctionne à merveille.

Joie!

Anonyme a dit…

Pauvre cult

Anonyme a dit…

Si je n'ai pas mis le "t"a culte c'est qu'il est minime.

Sémiramis a dit…

Oui, mais il est insidieux... Propagande subliminale... eh eh eh...