31 mai 2006

Jean Genet à Tours

Je n'ai pas vu l'expo dont tout le monde parle, qui se tient en ce moment au musée des beaux arts de Tours. Cependant je trouve dans cet évènement - et dans mon incapacité à faire ce que j'ai à faire de façon urgente - l'occasion de ressortir un petit livre que m'avait offert ma chère marraine - qui ne l'était évidemment pas encore - il y a 5 ans: l'atelier d'Alberto Giacometti, de Genet, publié aux éditions de l'Arbalète.
Très beau livre sur tous les plans, écriture, photos, sensibilité charnelle de la scupture. On comprend les termes de l'amitié entre les deux artistes: rencontre de deux solitudes qui se parlent par oeuvres interposées. De nombreux textes peuvent constituer la source de méditations. Je vous en livre un particulièrement beau de brutalité.


Il y a quatre ans environ, j'étais dans le train. En face de moi, dans le compartiment un épouvantable petit vieux était assis. Sale, et, manifestement, méchant, certaines de ses réflexions me le prouvèrent. Refusant de poursuivre avec lui une conversation sans bonheur, je voulus lire, mais, malgré moi je regardais ce petit vieux: il était très laid. Son regard croisa, comme on dit, le mien, et, ce fut bref ou appuyé, je ne sais plus, mais je connus soudain le douloureux - oui, douloureux sentiment que n'importe quel homme en "valait" exactement - qu'on m'excuse, mais c'est sur "exactement" que je veux mettre l'accent - n'importe quel autre. "N'importe qui, me dis-je, peut-être aimé par-delà sa laideur, sa sottise, sa méchanceté".
C'est un regard, appuyé ou rapide, qui s'était pris dans le mien et qui m'en rendait compte. Et ce qui fait qu'un homme pouvait être aimé par-delà sa laideur ou sa méchanceté permettait précisément d'aimer celles-ci. Ne nous méprenons pas: il ne s'agissait pas d'une bonté venant de moi, mais d'une reconnaissance. Le regard de Giacometti a vu cela depuis longtemps, et il nous le restitue. Je dis ce que j'éprouve: cette parenté manifestée par ses figures me semble être ce point précieux où l'être humain serait ramené à ce qu'il a de plus irréductible: sa solitude d'être exactement équivalent à tout autre.

30 mai 2006

O Jeanne, priez pour la France!

Nous fêtons aujourd'hui ste Jeanne d'Arc, patronne secondaire de la France.
Ce qui me rappelle un refrain bien connu des tourangeaux...
Alors, prions pour la France! Ce n'est pas si ridicule, elle en a bien besoin, et si nous ne le faisons pas, ce n'est pas les voisins qui le feront! (Rires, rires).
Et puis, honnêtement, il vaut mieux prier Jeanne que Ségolène ou Nicolas : c'est plus sûr, non? Peut-être pouvons nous confier à cette militante le futur proche de nos élections!
Bonne journée!

29 mai 2006

Les wallabies ont-ils une âme?

C'est une question qui me taraudait - non pas par un sentimentalisme morveux du genre indigné "mais enfin vous le voyez bien dans son regard espèce de sans coeur que cette petite bête a une âme" - mais à propos de la résurrection, en fait.
Ceux qui me connaissent bien ne manquent pas d'être surpris par mon émerveillement continu devant ces sympathiques marsupiaux. Toujours mes questionnements falquiens, dont mon ami tarte préféré se fait le complice et ne manque pas d'éclairer les zones d'ombres. Alors, quel genre d'âme ont les wallabies, et, en conséquences, sont-il apellés à ressusciter? En tant que créatures réglées par un instinct, ils ne sont pas libres, et ne sont pas pécheurs. Mais pour autant, n'allons pas trop loin; dans ce genre de cas, rien ne vaut l'ordre de st Dominique, et c'est St Thomas, encore et toujours, qui est venu mettre au clair tout cela et rafraîchir mes souvenirs aristotéliciens.
Evidemment, comme le souligne la question 75 de la prima pars de la Somme Théologique, rappellant le Peri Psuchès du Stagirite, l'âme des bêtes n'est pas subsistante en elle-même. les animaux ne disposent que des fonctions nutritives, motrices et sensitives de l'âme. C'est le propre de l'âme humaine, qui est intellectuelle, d'être incorporelle et subsistante. Donc, pas d'hésitation: les bêtes n'ont pas d'âme immortelle.
Elles seront donc exclues de la nouvelle création? Pfffffffffff ça me contrarie. Le paradis sans wallabies? Il est vrai que la pleine possession de Dieu nous suffira! Mais elle serait réservée à la créature douée d'intelligence?
Je sens que je tends vers l'hérésie! Pardonnez moi; la nuit porte conseil: que Dieu vous garde des tribulations de l'imagination. Pax.

27 mai 2006

Attache moi! Chroniques de mes lectures

Ca y est, je suis une vrai littéraire : j’ai enfin lu – et en entier, s’il vous plaît, le Rouge et le Noir !
Après cette cynique et grinçante lecture, ne sachant plus à quel saint me vouer, j’ai avisé un Camus qui traînait depuis cinq ans sur ma bibliothèque. Je dis « sur » parce qu’il n’est pas « dans » : il n’y a pas encore de place. J’hésite fort à en trouver une à un livre avant de l’avoir lu, et mon expérience de lecture de l’étranger ne me laissait pas augurer mieux de celui ci (lu en 40 tristes minutes dans le train, m’a laissée complètement désabusée).
Effectivement, devant mon manque d’enthousiasme après l’ingurgitation des 80 premières pages de la Peste (il y en a quelque chose comme 230, quand même), mon frère Ulrich, connaissant l’influence de la littérature sur mon état général, et l’influence de mon état général sur l’ambiance locale, me tendit avec un air engageant un petit volume au titre malicieux.

Je me suis donc plongée dans Gros-Câlin, de Romain Gary, alias Emile Ajar, dont je n’ai fait qu’une bouchée. Une bouchée qui sera digérée avec soin !
Je vous passe les détails de l’intrigue, amusante et décalée, que je vous laisse découvrir par vous même pour plus de plaisir. Ce qui importe, c’est que ce roman facétieux touche juste, dans toutes ses exagérations et ses caricatures. J’ai rarement lu dans une langue aussi belle et aussi libre une telle réflexion sur la difficulté de s’accepter, le besoin de tendresse et d’amour, en bref sur la capacité d’attachement de l’être humain. Et sur le tête à tête avec soi-même…
« Je fus tiré de mon bain par un coup de téléphone, c’était naturellement une erreur, et à force de répondre toujours « c’est une erreur », je commence souvent à me sentir comme ça, je veux dire, comme une erreur. Je reçois un nombre incroyable d’appels téléphoniques de gens qui ne me connaissent pas et ne me demandent pas, je trouve ces tâtonnements à la recherche de quelqu’un très émouvants, il y a peut-être un subconscient téléphonique où s’élabore quelque chose de tout autre » (p. 161, édition Folio).

26 mai 2006

Ceci n'est pas une plaisanterie

Je souhaite à tous

les joyeux drilles,

les blagueurs et les plaisantins,

les taquins et les facétieux;

mais aussi à tous les mornes et tristounets,

une bonne fête de Philippe Néri!

Bon week-end.

25 mai 2006

Prenons de la hauteur!


Je souhaite à tous une très bonne fête de l'Ascension.
Ce matin, le père Rimbault nous invitait à "prendre de la hauteur avec le Christ", lui qui emporte les angoisses et les souffrances de notre humanité vers le Père dans son ascension vers le ciel. Et de nous rappeller la nécessaire horizontalité du "lien de la paix" qui unit les hommes: au moment de la verticalité de cette ascension, le Christ bénit ses amis, soulignant cette dimension "horizontale" de l'amour qui encore une fois, n'a pas d'autre source que Lui.
Alors, prenons de la hauteur avec le Christ!
Et laissons nous envoyer par lui vers nos frères dans ce lien de la paix. L'urgence de la charité et du pardon se fait sentir!
"Ayez beaucoup d'humilité, de douceur et de patience, supportez-vous les uns les autres avec amour ; ayez à coeur de garder l'unité dans l'Esprit par le lien de la paix" Eph. 4.

24 mai 2006

La passion de la prédication


Alors que enfin, j'ai mis un terme à ce travail intellectuel et spirituel porté depuis des mois, je crois que l'Esprit m'a donné aujourd'hui les mots de l'action de grâce.
L'ordre des prêcheurs célébrait, en ce 24 mai, la fête de son père Dominique. L'occasion de revenir sur le travail de la prédication qui est le charisme de l'ordre, grâce à une très belle homélie, offerte par un frère âgé, le frère Dominique. La vocation particulière du jeune st Dominique a pris naissance lors de la fameuse rencontre avec l'aubergiste hérétique cathare, à Toulouse. Dominique, jusqu'alors, avait étudié la Parole et la théologie.
Ce jour de la rencontre avec l'autre est celui de l'accomplissement de cette étude dans ce qui constitue sa seule fin: la prédication en vue de la conversion.
Pourquoi étudier la parole si ce n'est pour se rendre toujours plus capable, toujours plus brûlant de la passion de la proclamer? La joie reçue, l'adoration du Seigneur qui naît du travail intellectuel ne sont certes pas une fin en soi, même si elles constituent une offrande de notre personne à la gloire de Son nom. L'étude, la recherche, sont autant de façon de contempler Dieu, et de le proclamer aux hommes de bonne volonté. Et c'est bien le sens de tout travail: une eucharistie, action de grâce envers Dieu, offrande de soi en vue du salut de ses frères. Par mon travail, je veux me donner à Dieu pour l'autre. Dominique était tenaillé par l'angoisse de la perdition des pécheurs. Combien plus grande était sa passion de la prédication!
Quelle joie pour moi d'avoir terminé ce travail: j'en fais offrande au Seigneur, que son ange vienne le déposer sur son autel saint, et... qu'il me préserve de l'orgueil qui est si prompt à surgir! Je n'ai pas fini de rendre grâce d'être tenue par cette passion de la prédication, cette joie de la contemplation de la VERITAS, contemplation dans laquelle l'alliance des yeux de l'intelligence à ceux de la foi donnent relief aux réalités naturelles et surnaturelles, les restaurant dans leur sens originel, leur sens pur... Puisse ce travail être utile à ceux qui, autour de moi, cherchent à mieux connaître le visage de Dieu.
In pace Christi, good night...
... en communion avec la famille dominicaine, à Tours, au ciel et ailleurs

21 mai 2006

Des bricks à la sauce caillou

Après un week-end passé à ripailler selon des modalités très rabelaisiennes, je crois pouvoir affirmer que mes amies et moi sommes bonnes à marier - l'ami tarte pourra, en toute honnêteté, le confirmer. Que préférer entre la mousse au citron de Ségolène, le caramel et les galettes d'Emilie, sinon mes bricks à la sauce caillou (hi hi hi)?
Ce petit jeu de mot plaisant me vient directement de l'esprit espiègle de mon papa, alors ne riez pas. Ceci étant dit, je vais faire un geste pour l'humanité en rendant publique cette simplissime recette qui épatera vos amis.
Faites vos courses: achetez un paquet de feuilles de bricks (en grandes surfaces, rayon frais avec les pâtes à tarte, ou magasins orientaux) - environ un euro dix.
Puis, pour la garniture, laissez parler votre imagination: thon et herbes liés avec des oeufs, chèvre et poires, pommes de terre et poireaux, amandes en poudre et miel, sardines parfumées, etc, etc. L'inconditionnel étant la viande hachée de boeuf assaisonnée copieusement d'oignons, de cumin et de piment (un délice!). L'essentiel est de bien égoutter les ingrédients pour que la farce soit bien compacte, et de bien la lier avec des oeufs si besoin.
Passez au travail d'origami: coupez les feuilles de brick en deux. Pliez la moitié obtenue en deux (côté brillant contre le plan de travail), placez un paquet de farce au bout de la feuille pliée et rabattez successivement la feuille pour former un triangle que vous fermerez en glissant l'extrémité de la feuille sous un pli. Très simple, je vous jure!
Vous faites frire tout ça dans une poêle bien chaude avec de l'huile de pépin de raisins (bien meilleure pour la santé que l'huile d'arachide, ndlr) et vous déposez sur un papier absorbant - surtout, servir chaud, mais vous pouvez les réchauffer dans une poêle sèche si il en reste!
Bon appétit! Oh, et, ça y est, il est minuit, alors je peux vous souhaiter à tous
BONNE FETE DE STE RITA!
Pax, gaudium, et appetitus.

19 mai 2006

Une apparente contradiction

Le frère Laurent Lemoine, op, nous soulignait dans sa prédication aujourd'hui "l'apparente contradiction, qui est en fait une heureuse alliance" entre amour et commandement, contenue dans l'évangile d'aujourd'hui : le "commandement de l'amour" donné par le Christ...
Commander l'amour?
Cela nous semble contradictoire, tant nous sommes en prise avec une définition affective de l'amour... Je ne saurais trop vous renvoyer à la lecture de l'encyclique "Deus est caritas" qui éclaire bien ces questions. L'amour ne peut évidemment pas se limiter à cet élan "érotique" (au sens plein du terme), de désir de l'autre, qui nous pousse vers lui irrésistiblement.
Dans l'éros, l'amour nous commande : nous sommes soumis aux passions, en proie à la plus vive joie et à la douleur la plus aigüe.
L'agapè, l'amour chrétien, est l'assomption de l'éros : le Christ nous donne d'entrer dans un amour qui ne nous soumet plus à son esclavage; désormais, nous commandons à l'amour qui est devenu "agapè": "charité".
Nous commandons à l'amour, nous pouvons donc suivre le commandement de Jésus: "aimez vous les uns les autres": nous sommes désormais capables d'orienter l'amour de façon "impersonnelle" - pour reprendre des termes simone weiliens. L'agapè débarrasse l'amour de nos penchants "personnels", qui impliquent des préférences...
L'agapè, c'est l'amour indifférent, impersonnel, que je peux éprouver pour toute personne dans ses différences et sa personnalité, au nom de l'amour de Dieu qui - comme le souligne S. Weil - fait tomber la pluie de la même façon sur les justes et les injustes.
Pax et VERITAS!
Et bonne fête de st Yves, prêtre et juge, à tous les juristes!

18 mai 2006

Des joies de l'engendrement

Il y a des joies spirituelles qui engagent le corps entier. Après avoir posé, en conclusion de ce beau bébé de 118 pages, une citation de l'épître aux Galates, j'ai l'impression de n'être plus qu'un tube de dentifrice duquel on aurait extrait toute la substantifique moëlle (comme dirait Chloé) mentholée : toute la matière grise, fraîche et stimulante, est sortie du tube, je suis un vrai légume.
Mais fiouuuuuuuuu, quel soulagement, quelle consolation, quelle joie! Je crois que l'on pourrait chanter un TE DEUM pour l'occasion, et puis les anges dans le ciel vont chanter toute la nuit à la gloire de Dieu,

Anuntio vobis gaudium magnum : Memorius natus est nobis!

Oui, un mémoire nous est né, un mémoire nous a été donné, celui qui le lira sera exalté !
Bon, j'arrête dans les élans mégalomanes. Pax et gaudium, et VERITAS !

Insomnie

Du Cantique des Cantiques...

Je dors, mais mon coeur veille:
J'entends mon bien-aimé qui frappe!
"Ouvre moi, ma soeur, ma compagne,
ma colombe, ma parfaite"

13 mai 2006

L'Eglise, le ventre et la Vierge Marie


Titre pour le moins surprenant, non ? En fait, pas tant que cela. En méditant sur mon amour passionné pour la cathédrale de Tours me sont venues de saugrenues considérations. Jugez plutôt.
Cette cathédrale, si je l’aime tant, c’est parce que je suis bouleversée à l’idée qu’elle est comme un ventre qui m’a engendré. Au jour de mon baptême, je suis entrée dans la cathédrale avec mon péché, et elle m’a engendré de nouveau : je suis sortie libérée pour toujours, marquée de l’amour de mon Père.
Effectivement, comment l’amour paternel pourrait-il faire naître la vie en l’absence d’une mère, qui porte la vie et la nourrit ? Eh bien je crois il en va de Dieu comme pour l’homme – ou l’inverse !
Pour que l’amour du Père céleste s’exprime, il faut bien que, dans la chair, une mère porte la vie. Cette mère, n’est-ce pas l’Eglise, et concrètement, nos églises ne sont-elles pas ces ventres de pierre desquels les baptisés ressortent vivants de la vie du Christ ?
C’est bien pour cela que Marie est dite « Mère de l’Eglise » : elle est la mère de l’Eglise mystique qui est le corps du Christ. En accueillant sa vie, elle a permis que l’action d’engendrement soit communiquée à l’Eglise pour que les hommes puissent renaître dans le Christ…

Nicodème lui dit: « Comment un homme peut-il naître, étant vieux? Peut-il une seconde fois entrer dans le sein de sa mère et naître? » Jésus lui répondit : « En vérité, en vérité, je te le dis, à moins de naître d'eau et d'Esprit, nul ne peut entrer dans le Royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair, ce qui est né de l'Esprit est esprit. » (Jn 3, 4-6)

Solennité de la dédicace de notre cathédrale

Hier, vendredi 12 mai, était un jour de fête pour l'église qui est à Tours : fête de la dédicace de notre cathédrale, placée sous le patronage de st Gatien - au XIVème siècle paraît-il. Quel sens pour cette fête que l'Eglise place au rang le plus élevé des célébration, celui de la solennité?
Eh bien, il s'agit avant tout d'une action de grâce et d'un mémorial. Mémoire de l'histoire humaine qui est celle de l'évangélisation et de la poursuite de la tâche apostolique dans cette unité écclésiale si fondamentale: le diocèse.
Mais aussi, action de grâce pour cette joie d'avoir une cathédrale - et celà vaut pour toutes les églises, d'ailleurs, qui sont la demeure de Dieu parmi les hommes, et la demeure des hommes qui sont amis de Dieu! Dans une homélie débordante de la joie pascale, le père Soubrier m'a une fois de plus portée à contempler l'incroyable mystère de cette rencontre de Dieu avec l'homme, rencontre qui a lieu dans l'Eglise. l'Eglise comme corps mystique, certes, mais bien aussi dans ces constructions humaines de pierre et d'histoire que sont nos églises: point d'intersection entre notre mouvement ascendant vers le Père, et le mouvement descendant du Christ qui nous visite. Une nouvelle occasion de méditer sur le mystère de l'Eglise, si merveilleux et insondable de grandeur.
Habiter la maison du Seigneur, c'est notre vocation: grâce au Fils, nous avons quitté la condition de l'esclave pour retrouver la maison du Père! Et la maison du Père, ce temple où je lui rends grâce, c'est l'Eglise universelle bien sûr, mais avant tout, cette église diocésaine de laquelle je suis si proche, dans laquelle je peux pleinement prendre ma place. La maison du Père, c'est ce lieu qui a été construit pour lui et qui préfigure à nos yeux la Jérusalem céleste. Elle est l'effort de l'homme pour donner à Dieu, dans ce monde déchu, une maison digne de Lui qui lui soit consacrée.
Mais moi aussi je suis un temple, une cathédrale; je contemple la beauté de mon corps, construit par Dieu : Il a construit ce temple de chair pour y habiter, et par le baptême, ce temple a été consacré pour Dieu. Que faire alors de nos actes quotidiens, sinon une liturgie d'action de grâce?

10 mai 2006

Athéisme et tragique de l'existence

Depuis les plaintes légitimes de l'ami tarte sur la longueur de ma prose, je m'applique à ne pas vous asséner de trop longs posts. Cependant, les réalités de la vie sont complexes, et il faut bien des palabres pour donner une juste idée de quelque chose. Je me vois donc amenée à redonner quelques précisions sur la notion d'athéisme sur laquelle je passais rapidement ce matin. Je précise que sur ce point comme sur beaucoup, je suis entièrement redevable à Emmanuel Falque, qui a décidément tout compris, et nous aide à considérer le monde contemporain avec les yeux de la Sagesse - qui sont deux! celui de la foi, celui de la raison!
Il me semble que la valeur de l'athéisme, dit "purificateur" par Simone Weil, se mesure par rapport à l'idée du tragique. Je reprends quelques notions nietzschéennes là encore: car il s'agit bien du reproche que Nietzsche fait aux chrétiens, celui de fuir devant le poids tragique de l'existence en se construisant des fictions rassurantes: les fameux "arrières mondes", et des "artifices et des petites boissons sanglantes"...
Nietzsche veut souligner le fait que la grandeur de l'homme se trouve dans l'acte libre du consentement à ce tragique, non dans la fuite et l'esclavage consenti envers un Dieu fictif et une religion qui méprise la vie. C'est en ce sens que pour lui, le christianisme méprise la vie: il nie cette existence tragique, terrestre, au profit de "l'au delà"... Le Christ crucifié est "malédiction de la vie"! A partir de là, il appelle de ses voeux l'homme qui est affirmation devant l'existence "le grand oui": le Surhomme contre le Ressuscité.
Mais la foi chrétienne est-elle négation du tragique de l'existence? Certes non, elle n'est pas un refuge devant la souffrance, mais au contraire, le lieu de sa transfiguration dans l'acte d'offrande christique. Avoir la foi ne préserve pas dans la souffrance - ou alors, il ne s'agit plus de foi mais d'un état pathologique, qu'en est-il du sens du tragique?
Peut-être sommes nous portés, grâce à la belle vertu théologale d'espérance, à voir toujours au-delà des limites de ce monde; car nous voyons les réalités actuelles avec les yeux de la foi, qui nous donnent à voir des réalités surnaturelles! Aussi est-il sans doute vrai d'affirmer que le sens du tragique n'est pas une spécificité chrétienne. C'est ce que l'athéisme vient nous rappeller: la grandeur de l'homme dans sa finitude, l'homme seul comme disait Montaigne.
J'insiste sur cette idée, car si nous voulons parler de Dieu ou penser Dieu dans le monde moderne, c'est de cet homme seul qu'il faut partir; je reprends à mon compte les indications d'Emmanuel Falque sur ce point: il faut quitter une théologie du surplomb, qui part du présupposé de Dieu. Il nous faut prendre le chemin de l'homme pour aller à Dieu... puisque Dieu a pris le chemin de l'homme pour se révéler!
BONNE NUIT*

Athéisme et idolâtrie

Suite à une réflexion d'Alexis sur ce blog, reprenant Lévinas, je vous soumets quelques points de repères sur la notion d'athéisme. J'ai un peu recherché dans Difficile Liberté la citation qu'il me proposait, mais ne l'ai pas retrouvée. J'entre donc directement dans le vif du sujet avec S. Weil:

"La religion en tant que source de la consolation est un obstacle à la véritable foi: en ce sens l'athéisme est une purification"
(cité par G. Thibon dans La Pesanteur et la Grâce)


Quelle est la valeur de l'athéisme, c'est-à-dire du choix d'une perspective qui se limite à la finitude humaine? Quand je pose cette question je me situe bien sûr sur le plan de ma propre foi. Alors que moi, j'ai découvert l'immense amour de Dieu qui vient éclairer ma vie tout entière, je découvre que d'autres hommes ont choisi de vivre sans cet amour. Il est important de souligner que ce qui est en jeu, c'est moins une ignorance de Dieu qu'un choix de ne pas vivre avec Lui.
Je ne peux cependant m'empêcher de souligner que refuser de vivre avec Dieu ne peut venir que d'une ignorance de sa vraie nature. Comment pourrait-on refuser l'amour infini? Là, nous touchons au point nodal. L'athéisme ne serait-il pas finalement, le refus conscient d'une représentation fausse de Dieu - dans le cadre d'une tradition religieuse qui risque constamment de tomber dans les travers de l'idolâtrie?

Prenons la figure emblématique de Nietzsche. Le rejet violent du christianisme dans sa pensée, et sa conception de l'athéisme sont avant tout fondés sur la conviction que le christianisme est mauvais - il est finalement moins question d'un Dieu mauvais que d'un mécanisme spirituel oppressif qui passe par la religion. La critique nietzschéenne porte sur l'idée d'une religion qui console et qui compense: critique partagée par S. Weil pour qui une religion qui repose sur la promesse d'une récompense est une idolâtrie. Quel est l'objet du culte des chrétiens? Dieu ou bien l'espérance de pouvoir échapper à une vie trop cruelle, de ne pas affronter le tragique de l'existence?


L'athéisme semble donc avoir ce rôle de purification de notre propre foi, nous rappellant à l'ordre pour ne pas tomber dans l'idolâtrie qui menace sans cesse notre esprit. Celui qui vit sans Dieu nous renvoie de façon insistante à cette question: Qui adorons nous? Mais, surtout, quelle image de Dieu donnons nous dans notre être, dans notre pratique religieuse, dans nos discours? Quelle cohérence entre ma foi et mon être visible?

Une invitation à la mission...

03 mai 2006

Un peu de militantisme

Il y a des jours où on se demande ce que veut dire "démocratie". Je vous livre le texte de la dépêche Zénit d'aujourd'hui et vous invite à signer cette pétition. Et à prier pour les femmes réduites à l'esclavage de la protitution.
Pétition de « Femina Europa » contre le « commerce humain » ROME, Mardi 2 mai 2006 (ZENIT.org)
« Alors que l’Allemagne organise la Coupe du Monde de football 2006, on annonce l’acheminement de 40 000 femmes d’Europe centrale et orientale à des fins de prostitution, en marge de cet évènement sportif international », dénonce un communiqué de l’association « Femina Europa » qui lance une pétition pour dénoncer ce « commerce humain ». Car, précise le communiqué, « 'Le football et le sexe vont de pair' déclare l’avocat d’un immense complexe prévu à ce commerce et situé à proximité du stade de Berlin, dans un pays où la prostitution volontaire est légalisée ». C’est pourquoi l’Association Femina Europa (info@femina-europa.com), présidée par Mme Elizabeth Montfort, se dit « scandalisée par l’organisation de ce commerce humain à l’opposé de l’esprit sportif ». « L’esclavage moderne, à l’encontre des femmes les plus vulnérables, est contraire aux valeurs de l’Europe, telles qu’affirmées dans tous les traités européens ainsi que dans la Charte européenne des Droits Fondamentaux (articles 1, 3 et 5). Cette pratique est un déni de la dignité et de l’intégrité de la femme. C’est la raison pour laquelle, Femina Europa soutient la pétition de la Coalition internationale contre la traite des femmes (CATW) », indique le même communiqué. Femina Europa demande en effet à tous les gouvernements de l’Union européenne de « signer et de ratifier la Convention de l’ONU du 2 décembre 1949 qui reconnaît « le lien entre traite et prostitution et condamne toute forme d’exploitation de la prostitution, même si la victime est consentante », et invite tous ceux qui s’opposent à l’exploitation sexuelle et commerciale des femmes à signer cette pétition.
Vous n'avez pour ce faire qu'à cliquer sur le titre du post... Merci!