31 mai 2007

Fête de la Visitation de la Vierge Marie


"Pousse des cris de joie, fille de Sion, car il est grand, au milieu de toi, le saint d'Israël"
Isaïe 12, 6

Tétralogie - pour Bruno

Bruno me pousse à un nouveau grand moment mégalomane en me demandant de me plier à sa suite au petit jeu de la tétralogie littéraire. Je ne peux que m'incliner devant la demande d'un ami qui m'implore aussi gracieusement. Ensuite, je le promets, je vous laisserai tranquilles: vous ne saurez rien sur la couleur de mon premier pyjama, ni sur mes permières pensées au réveil, ni sur ... Stop, promis! Voici donc:

Les 4 livres de mon enfance et de mon adolescence:
- Les Club des 5, les Soeurs Parkers, Caroline Quine, et autres thrillers: Maigret, Arsène Lupin, Agatha Christie etc (je commence déjà à tricher là, non?): pas très spirituel, mais j'ai pris l'habitude de lire vite et beaucoup.
- Mythes et légendes de la Grèce antique, que mes parents nous lisaient. J'aimais beaucoup l'histoire de Persée et de la Gorgone!
- 100 ans de solitude, ou Cièn anos de soledad: l'invasion imaginaire.
- Les raisins de la colère, ou The grapes of wrath, John Steinbeck: l'injustice et la condition rurale.

Les 4 écrivains que je lirai et relirai encore: Ouh la la, que c'est difficile! Ceux que j'aimerais lire et relire en ce moment sont trop nombreux, et à l'âge de la vieillesse, comment puis-je augurer des livres qui subsisteront dans la petite bibliothèque, ascétique, épurée, qui jouxtera le lit de ma faiblesse?

Réponse très improbable...

- Musil, pour osciller éternellement entre mystique et réalité, action et contemplation, fusion et déchirement
- Melville, pour sa violente splendeur
- Teilhard de Chardin, pour l'extase intellectuelle garantie
- Simone Weil, évidemment, et Nietzsche!

Ce à quoi j'ajoute les Saintes Ecritures, dont les auteurs sont multiples, auxquelles je me confronterai chaque jour. Et probalement aussi Flaubert...

Les 4 auteurs que je ne lirai probablement plus jamais:
- Mary Higgins Clark (on en a lu un, on les a tous lus...)
- Albert Camus (n'est-ce pas Thibaut?)
- Marie Darrieussecq: la seule fois où un livre m'a donné envie de vomir
- .... Quine, Feyerabend, Popper... et bien d'autres...

Les 4 premiers livres de ma liste de livres à lire: Cette liste n'existe pas, la lecture étant la réponse à un élan de l'âme et du coeur, je ne la planifie pas. A vue de nez, les prochains seront probablement :

- La pensée de Karl Marx, de Jean-Yves Calvez
- Le sacrifice interdit, de Marie Balmary
- Maison de poupée, de Ibsen
- Henri Matisse, roman, Aragon

Les 4 livres que j'emporterais sur une île déserte:

- La Bible, logiquement
- L'homme sans qualités, de Musil
- Fureur et mystère, de René Char, jusqu'à ce que je connaisse tout par coeur
- Bouvard et Pécuchet, pour alléger un peu le tout, et me payer de sacrés fous rires.

Les dernières lignes d'un de mes livres préférés: Arf, je préfère les Incipit d'ordinaire, les dernières lignes sont trop cruelles et déchirent le coeur.

"Il fait nuit encore, et il fait froid, mais encore un instant et les portes et les volets s'ouvriront, la maison déserte revivra, s'emplira de pleurs et de rires d'enfants, résonnera des pas pressés de la femme aimée, du pas assuré du maître de maison.

Ils restaient immobiles, tenant leur cabas à la main, et ils se taisaient"

Vie et Destin, Vassili Grossman éd. Julliard - l'Age d'Homme, repris en Pocket.

Les quatre lecteurs dont j'aimerais connaître les carrés magiques: Nicolas Sarkozy (car j'espère qu'il lit), Benoît XVI, Emmanuel Falque et Mgr Jean-Marie Levert (car je prie pour qu'il ait le temps de lire!).

J'aimerais bien aussi connaître ceux de mes lecteurs... Tatianus, Tertius, Funny Friend, Halio, Coincoin, Camille, Raph, Tschok, et toute la smala... A bon entendeur!

30 mai 2007

Rembrandt et la nouvelle Jérusalem (céleste!)

Le musée d'art et d'histoire du judaïsme propose jusqu'au 1er juillet une foisonnante et passionnante exposition intitulée "Rembrandt et la Nouvelle Jérusalem". Entre la première Jérusalem à la Jérusalem Céleste, elle nous permet de nous immerger dans un contexte très particulier, autour de l'oeuvre de Rembrandt: celui de l'installation, au Pays Bas, d'une importante communauté juive issue de la péninsule ibérique - principalement du Portugal.


L'exposition est parfaitement conçue de manière à faire entrer dans une intimité intelligente avec l'oeuvre du grand maître, en permettant de se placer de façon pertinente dans le contexte culturel qui entourait sa gestation. Articulant la précision historique et didactique aux oeuvres - principalement des dessins, l'impression d'ensemble qui se dégage est un équilibre bien trouvé entre stimulation intellectuelle et plaisir tout esthétique. Une exposition qui fait ainsi appel à l'unité de la personne, ça ne se loupe pas, et vaut bien la peine de faire une heure de queue et de bousculer ses (nombreux) voisins!
C'est au tout début du XVIIème que des juifs, chassés du Portugal et de l'Espagne par les persécutions catholiques (eh oui... il faut bien le reconnaître!) s'installent durablement au Pays Bas. La Nouvelle Jérusalem n'est pas encore la Cité Céleste, c'est Amsterdam. La ville est en pleine expansion commerciale et marchande, à une époque où les échanges avec les Indes et les Amériques se développent. Les juifs, qui ont conservé de nombreux réseaux tant familiaux que professionnels, prennent une place décisive dans ces échanges.

Et Amsterdam devient le creuset d'un troublant mélange, et cet évènement constitue une petite révolution, tant sur le plan culturel que sur le plan religieux. Amsterdam devient le théatre de la rencontre entre le judaïsme, le monde chrétien issu de la Réforme, et... la peinture de Rembrandt. On découvre avec étonnement qu'un des quartiers de la ville, celui de l'écluse saint Antoine, abritait à chaque coin de rue de grand bonhommes, marchands fortunés et mécènes, intellectuels, artistes, et que tout compte fait, Rembrandt et Spinoza étaient quasiment voisins!
La rencontre entre judaïsme et christianisme est d'autant plus intéressante que ces juifs portugais et espagnols étaient ce que l'on appelle de "Nouveau Chrétiens", ou "conversos", ou encore "marranes". Contraints à la conversion pour survivre en milieu catholique, ces juifs avaient en réalité conservé tant bien que mal la foi de leurs pères. Tant bien que mal: c'est donc un peuple enfin libre de vivre librement le judaïsme, mais bien peu intruit de ses rudiments, qui débarque dans une région transformée par la Réforme. L'organisation communautaire de la "Nouvelle Amsterdam" passera donc autant par la construction de la Synagogue que par le recrutement de nouvelles élites, qui devront enseigner à ce peuple déraciné les bases de sa foi... et jusqu'à la langue dans laquelle elle se pratique. Une aubaine que cette nouvelle proximité pour des chrétiens qui prônaient un retour aux racines, au judaïsme... Autour de ces "conversos" va se développer un courant philosémite, qui ira même jusqu'à un phénomène "d'identification hébraïque" dans la nation toute fraîchement constituée des Provinces Unies et pour la communauté protestante.
Autour de la peinture de Rembrandt se cristallisent donc les échanges foisonnants et riches entre judaïsme et christianisme, sur fond de libéralisme religieux en terre protestante. Questionnements sur l'interdit de la représentation, lectures des écritures, en particulier du permier testament, à la lumière des commentaires du Midrash, de la kabbale et des "Antiquités judaïques" de Flavius Josèphe... L'exposition, riche en dessins, permet de constater combien l'influence de la lecture psychologisante du Midrash a influencé l'art du peintre. Et de conclure sur la réflexion millénariste suscitée par les temps, et par l'émulation de grands esprits; en particulier, le rabbin Menasseh Ben Israël, dont Rembrandt illustra un traité.
Magique de constater finalement que, tout compte fait, entre réformés, juifs redécouvrant leur foi - et familiers du catholicisme, les échanges mutuels aboutissement dans une commune espérance en l'avènement de la Nouvelle Jérusalem... Céleste, cette fois!

23 mai 2007

Très, très fort!

Pour Ségolène


Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais il est vraiment malin, notre président. Et le mot est faible.
Bon, je vais dormir; j'essaierai de vous écrire quelque chose d'un peu intelligent pour la Pentecôte, mais rien de garanti. Les journées sont trop courtes, et puis il faut bien manger les cerises dans l'arbre avant que ces foutus sansonnets s'en occupent. Que voulez vous, il faut faire face à ses devoirs...

22 mai 2007

La minute mégalo: top, on y va!

Allez, pour changer, je vous parle de ma noble personne, et je sacrifie comme une midinette à la grande vague questionnaire proustien lancée sur cette blogosphère. Après Camille, et Halio, voici...
- Ma vertu préférée: La Force évidemment, après tout je lui ai consacré quelques heureuses heures de réflexion. Vis en latin, andréia en grec: la force de l'homme, le courage viril! Tout un programme...
- Le principal trait de mon caractère: l'intégrité, dans le sens de l'entièreté et de l'absoluité (non que je ne sois pas honnête mais euh...)

- La qualité que je préfère chez les hommes: l'autorité de l'intelligence.
- La qualité que je préfère chez les femmes: l'autorité de l'intelligence.
- Mon principal défaut: l'exigence, parfois tyrannique.
- Ma principale qualité: une certaine forme de pragmatisme providentiel.
- Ce que j'apprécie le plus chez mes amis: la curiosité.
- Mon occupation préférée: Sans hésiter, il faut le dire, manger de belles et bonnes choses, avec des amis chers, en buvant le vin qui réjouit le coeur de l'homme! Et en riant de tout ce qui pourrait nous faire pleurer.
- Mon rêve de bonheur: la minute qui vient, la journée qui vient, l'année qui vient, le Royaume des Cieux qui vient lui aussi, une éternité de louanges à la gloire de Dieu dans la contemplation de la splendeur de sa Face!
- Mon plus grand malheur serait: de perdre un de mes enfants.

- A part moi-même qui voudrais-je être? Ah, si je pouvais, je serais homme: Teilhard de Chardin, sublimement beau, mystiquement intelligent, visionnaire.
Mais si je devais rester une femme, la grande odalisque: splendide et veloutée, somptueuse, mystérieuse.
- Où aimerais-je vivre? dans n'importe quel lieu pourvu que j'aie choisi d'y vivre.
- La couleur que je préfère: question difficile et insignifiante. En ce moment, j'ai envie de dire: le vert doré des champs d'orge qui scintillent sous le soleil, et qui, sous le vent, deviennent d'argent.
- La fleur que j'aime: mon orchidée, cadeau d'une des mes clientes (une des plus fauchées, évidemment). Vivre avec un être vivant, ne serait-ce qu'une fleur, est une expérience étonnante.
- L'oiseau que je préfère: tous ceux qui ne viennent pas bouffer les cerises avant moi dans le cerisier, je les préfère aux autres.
- Mes auteurs favoris en prose:
Musil bien sûr, Vassili Grossman, Herman Melville... George Sand, Bernanos, Flaubert, Austen, Gogol, Tolstoï... et tous les autres...
Et les philosophes, c'est de la prose? Simone Weil mon égérie, Nietzsche mon mentor, Rousseau mon choupinet etc etc.
Et les jésuites, c'est de la prose? De Lubac, Teilhard, Teilhard, Teilhard!
- Mes héros dans la fiction: l'homme de mes rêves: le prince André de Guerre et Paix, le prince Hector de l'Illiade, tous les héros romantiques en général;
Les couples mythiques: Bouvard et Pécuchet, Agathe et Ulrich de L'homme sans qualités, Gai Luron et Belle Lurette (les plus chastes).
- Mes héroïnes favorites dans ma fiction: Consuelo de George Sand, les héroïnes austeniennes, Constance D (merci Thibaut), Bridget Jones (merci Funny Friend!).
- Mes compositeurs préférés: les classiques (Mozart, etc), les romantiques (Chopin...), le XIXème décadent (Bizet!!), les renaissants: et en particulier Josquin Desprez, les baroques (Monterverdi, Marais), les opérettes (Vives), mais avant tout et surtout Bobby Lapointe, auteur, compositeur, interprète, contrepète et saucisson de cheval.
- Mes peintres préférés: Matisse, le maître absolu; Ingres, Klein, Rebeyrolle, Fouquet, les primitifs flamands et italiens, Cogniet, Delacroix...
Et les sculpteurs: Gaudier Brezska, Bourdelle, Claudel
- Mes héros dans la vie réelle:
les saints de Dieu
- Mes héroïnes dans la vie réelle:
les saintes de Dieu
- Mes héros dans l'histoire:
les prêtres réfractaires de la Révolution Française, entre autres.
- Ma nourriture préférée: Thé, huile d'olive, miel, pain frais, fromage de chèvre, salades variées, poisson cru, pâtes pesto, confitures et fromage frais, vin rouge et toutes sortes de mets étonnants.
- Ce que je déteste par dessus-tout: la médiocrité et la mauvaise foi.
- Le personnage historique que je n'aime pas:
Mitterand.
- Les faits historiques que je méprise le plus:
La Révolution Française.
- Le fait militaire que j'estime le plus:
tous les noms humblements inscrits sur les monuments aux morts des villages de campagne.
- La réforme que j'estime le plus:
celle que Spinoza fait subir à l'entendement humain.
- Le don de la nature que je voudrais avoir:
l'innocence de l'instinct, pur de tout péché.
- Comment j'aimerais mourir:
comme la Vierge Marie, être emportée au ciel.
- L'état actuel de mon esprit:
l'exaltation, la joie, la "dilatation spacieuse" (arf arf arf)
- La faute qui m'inspire le plus d'indulgence:
celle qui est vécue dans la culpabilité sclérosante.
- Ma devise:


Nunc est bidendum!

20 mai 2007

Les pêcheurs de perles à l'opéra de Tours

Pour conclure ma grande semaine mélomane, il me reste à vous racontre la représentation à Tours des "Pêcheurs de perles", opéra de Bizet certes bien moins fameux que Carmen, mais très abouti musicalement selon les experts.
Le livret est un summum dans l'art difficile de la truffe, kitch et sentimentalisme sont au rendez-vous. Voici ce que j'en ai compris - il n'y avait malheureusement pas de sous-titres pour nous aider à entrer dans l'histoire!
Surfant sur la vague orientalisante de son époque, Bizet nous transporte vers les lointains rivages de Ceylan...
Là les pêcheurs de perles accomplissent chants et danses rituelles, et désignent leur nouveau chef: ce sera Zurga, barbe brune et fier turban. Celui-ci n'est pas sitôt élu qu'il retrouve un vieil ami, que dis-je, un frère - Nadir, et ils se remémorent leur rencontre: assez chevaleresques, les deux lurons étaient tombés amoureux de la même jeune femme, prêtresse, donc interdite, et s'étaient jurés de ne pas laisser libre court à cet amour, impossible, et en outre concurrentiel... Suit donc une belle scène virile de serments d'amitiés entre ténor et baryton.
Mais le beau Nadir (car il est beau évidemment, quoique vêtu d'une espèce de pyjama qui ne met pas en valeur son sex appeal) est rongé par les remords. Il aurait peut-être dû avouer à Zurga qu'il avait été un peu plus loin, qu'il avait suivi la belle prêtresse...
Pendant ce temps, les cérémonies rituelles continuent sur la plage, présidées par le nouveau chef: voici qu'arrive la prêtresse Leïla, vierge consacrée aux divinités de la mer, qui par sa consécration protège le village et ses habitants, les pêcheurs de perles. Celle-ci, magnifiquement voilée, prête de nouveau serment au chef et au villageois, devant le grand prêtre Nourabad.
Elle apparaît comme l'offrande pure, sacrifiée dans sa jeunesse et sa beauté que l'on suppose sous le voile immaculé... Offerte aux divinités païennes, sa vie ne lui appartient plus: elle est soumise à la fatalité de son destin. Pas cool.
Mais un trouble profond s'empare alors d'elle. Cette voix, ne la reconnait-elle pas? Ne serait-ce celle de ce bel inconnu qu'elle aime? Et Nadir, de son côté, est envahi par le même trouble... Heureuse conïcidence...
Bravant tous les interdits, Nadir court rejoindre, durant la nuit, la belle qui le fait frémir. Reconnaissant, sous le voil consacré, le visage de la belle prêtresse, il s'abandonne à l'amour, et est aimé de retour par la belle Leïla.
C'est là que tout se gâte: les divinités se révoltent contre ce crime de lèse majesté, l'orage se déchaîne, le grand prêtre débarque, bref, ça va mal. Les amants sont maudits par les villageois, voués à une mort atroce... Heureusement, la clémence de Zurga, qui n'a jamais vu le visage voilé de la vierge, intervient: les amants seront libres. Malheureusement, l'envie lui prend de soulever le fameux voile, et là, paf, il reconnaît Leïla, et le voici pris par les démons de la jalousie...
Non, Nadir et Leïla ne seront pas sauvés: ils mourront, et l'exécution se prépare, malgré les supplications de Leïla auprès du pauvre Zurga, rongé par la jalousie et le désespoir. La belle Leïla, voyant Zurga inflexible, confie le collier qu'elle porte qui doit être porté à sa pauvre mère. Ce collier de perles lui avait été offert par un étranger qu'elle avait sauvé de la mort, alors qu'elle était enfant. Zurga se rend compte alors que cet étranger n'est autre que lui! Que va-t-il se passer, Zurga aura-t-il le courage de laisser mourir celle qu'il aime, et qui lui sauva la vie, et son ami si cher?
L'exécution se prépare cependant. La fosse flambante où seront précipités les amants maudits est déjà allumée. Le grand prêtre chante. Mais une lueur inquiétante apparaît au loin! C'est le feu! Le village est en proie au feu! Zurga l'a lui-même allumé pour permettre aux amants de s'enfuir, dans la panique générale...
Il reste seul, devant les flammes de l'incendie de son village, consumé par les flammes de sa passion...


Quand on ne connaît pas l'histoire au préalable, le premier acte est un peu ardu. Mais bien vite, l'action se déploie, et l'on est touché par la grâce des duos sublimes, des mélodies riches et douces.
Prévenus par avance que le ténor assurant le rôle de Nadir, Martial Defontaine, était souffrant, nous fûmmes indulgents: il n'en fut pas moins touchant, même si sa voix ne poussait pas trop loin. La belle Sophie Graf était parfaite dans le rôle de Leïla.
Quant à la mise en scène de Nadine Duffaut, elle joue à fond la carte du kitch chromo asiatique, avec robes croisées, couleurs kitsch et turbans. Kitsch renforcé par l'option de mise en scène qui intégrait des danseurs indiens, et en particulier une danseuse soliste.
Les scènes de groupe, présentant les chants et danses des villageois, étaient peut-être un peu trop foisonnantes à mon goût.
Restent les mélodies de Bizet, et un spectacle honorable, soutenu par une direction enthousiaste menée par Vincent Barthe à l'orchestre. Et la fierté de la petite fille assise à côté de nous, qui se tourne vers nous lorsque le chef d'orchestre monte saluer, et nous dit les yeux brillants: "c'est mon papa!". Joie!
Ill:
- Grand escalier de l'opéra de Tours
- Mise en scène de Nadine Duffaut pour les Pêcheurs de Perles à Avignon, 2007

17 mai 2007

Un ange passe...






Musée des Beaux Arts d'Orléans: collections romantiques, leg Cogniet
1, Autoportrait de Léon Cogniet

2, Portrait d'Achille-Etna Michallon, peintre paysagiste, par Léon Cogniet

3, Etude pour la scène du Massacre des innocents (plus sûre du titre)

Tharaud triomphe à Orléans

La salle était comble, ce mardi soir, et la bonne société orléanaise se pressait pour venir applaudir Alexandre Tharaud. Evidemment, à 20 euros la place pour tout le monde, l'association ( étudiante ! ) organisatrice ne visait pas un public prolétaire. C'est donc entourés de têtes grises et de foulards Burberry qu'Ulrich et moi-même nous régalâmes de la prestation du bel Alexandre.

Le programme annonçait quatre extraits de la "Suite en la" de Rameau, les huit "Valses nobles et sentimentales" de Ravel, et pour finir en beauté, vingt-quatre Préludes opus 28 de Chopin. Cerise sur le gâteau: les nombreux et fervents rappels: Vivaldi transcrit par Bach et quelqus Valses de Chopin. Nous n'aurons pas entendu les "Barricades mistérieuses"... Tant pis!
On aurait voulu que cela ne se finisse jamais. Cruel retour à la réalité lorsqu'il faut sortir dans le hall bondé, sous la lumière blafarde des néons, où se pressent les groupies!
Pour ma part, j'assistais pour la première fois à un concert de piano. Je n'avais jusque là jamais vu que des ensembles (baroques principalement), ou des choeurs, domaines de prédilection de mes parents. Mes premières impressions ont donc été très intenses. On ressent quelque chose de très fort entre le pianiste et l'instrument.
Le piano s'étend sur la scène comme une grande carcasse luisante, dont les entrailles d'écorché vif flamboient doucement sous les feux de la rampe. L'interprète, frêle et d'une fragile beauté devant la noire silhouette, semble véritablement en dialogue avec elle. Nous ne voyions pas, depuis nos places, le visage d'Alexandre Tharaud, mais j'étais fascinée par le spectacle surréaliste de ses mains se reflétant parfaitement dans le panneau laqué. Une étrange image que ces deux paires de mains, les unes rattachées à un corps, face aux autres, les mains sans maître! Peut-être, cette image nous permet-elle de saisir quelque chose de l'expérience du musicien, littéralement projeté hors de lui-même par les gestes qu'il exécute.
Tharaud s'affirme d'autant plus en dialogue par son habitude de jouer avec la partition devant lui. La page éclatante de blancheur, qui rayonne sous les projecteur, s'affirme comme la présence de l'auteur de l'oeuvre, renvoyant à l'ego de l'interprète la limite du sien. Et le tourneur de page, comme une rassurante altérité, se tient auprès de l'artiste qui semble parfois sous le coup de la possession dont parlait déjà Platon.
Ce n'est donc pas au triomphe d'une subjectivité, celle de l'interprète virtuose et adulé, auquel on assiste, mais à la magique rencontre entre l'auteur en sa partition, l'interprète et son génie, et le public...
Rappellé plusieurs fois, applaudi par la salle comble, il semblait sincèrement humble et digne, s'appuyant de temps à autre sur son piano.

14 mai 2007

Carmen au théâtre du Châtelet

Mon exaltation était à son comble, jeudi dernier, lorsque le rideau du théâtre du Châtelet se leva! Quoique connaissant par coeur les airs et les dialogues, j'ai pu expérimenter avec délices combien assister à la représentation d'une oeuvre est la source d'une découverte fondamentale.
Le grand mérite de la mise en scène de Martin Kusej a été de me révéler l'extrême violence de l'oeuvre, qui s'affirme visuellement, et que l'on ne se figure pas forcément à l'oreille. Si les choix musicaux de Bizet traduisent la tension dramatique qui monte en puissance peu à peu, ce que la mise en scène fait apparaître nettement, c'est le caractère tragique de l'oeuvre.
La tragédie s'impose dès les premiers mouvements, dès l'ouverture, avec l'exécution d'un inconnu que l'on comprendra finalement être celle, préfigurée, de Don José. Ouvrant et bouclant la représentation, la scène de l'exécution donne à celle-ci un caractère cyclique fataliste qui fait basculer l'oeuvre du drame à la tragédie. La scène des cartes, et l'angoisse réelle de Carmen qui lit les cruels desseins de la Providence dans celle-ci, éclaire de façon décisive l'oeuvre telle que les choix de la mise en scène ont voulu nous la montrer. La mort omniprésente, comme liée indissolublement à l'amour.
La mort de José n'est pas spécifiée dans le livret original, pas plus d'ailleurs que celle du torero Escamillo et de la fiancée abandonnée, Micaela. Le choix de les mettre en scène est pourtant très juste. Nul ne subsistera donc de ces personnages déchirés par les passions amoureuses, et les meurtres et corps sanglants donnent lieu aux plus belles scènes, esthétiquement parlant, de la représentation. Les corps de Carmen et du Torero qui se croisent lors de la scène finale restent présents dans l'esprit...
Sur le plan musical, la prestation de Marc Minkowski et de l'orchestre était fabuleuse. Le parti a été pris de transformer en dialogues parlés les dialogues chantés, qui donnent une fluidité à l'écoute, mais ne permettent pas à mes yeux de se figurer la vraie nature des sentiments qui animent les personnages. On pouvait d'autant mieux perçevoir les rapports entre les protagonistes, qui ont tendance à être unifiés par le chant. Don José apparaît sûrement comme beaucoup plus faible que son personnage ne l'est dans l'original: il est la victime, moins de Carmen que de sa propre faiblesse qui l'entraîne dans une passion destructrice. Carmen, quant à elle, est justement campée, à mon avis, en femme libre, pas si cruelle que ça. Elle pose ses choix, assumant leurs conséquences fatales.
La violence est en réalité sous-jacente dans chaque scène, et parfaitement exprimée par la mise en scène, et sous la modalité, très intéressante, de l'opposition entre masculin et féminin. Opposition qui prend la forme d'une bataille rangée entre les troupes soldatesques et les cigarrières: deux groupes parallèles qui marchent au pas, les femmes adoptant la conduite martiale des hommes...
Dès l'ouverture, la pauvre Micaela est la victime des assiduités des soldats qui s'ennuient. Sa relation pitoyable avec José se soldera par sa mort. Les cigarrières provoquent les soldats et les manipulent avec effronterie. Carmen, pourtant amoureuse de José, lui fait subir un odieux chantage affectif pour le forcer à la suivre dans la montagne. Elle même est poussée à partir, alors qu'elle ne le voulait pas, par les chefs de sa bande... La complémentarité entre hommes et femmes semble n'apparaître que dans la scène ou les brigands supplient les femmes de les suivre, car "quand il s'agit de tromperies, il faut avoir des femmes avec soi!"
Le rapport hommes/femmes semble définitivement brouillé par les données d'un jeu de pouvoir qui se solde par plusieurs bains de sang.
Cet affrontement est synthétisé et sublimé lors de la scène finale de l'assassinat de Carmen où le choeur, qui entoure le couple qui se déchire, commente le combat, dans l'arène, entre le torero et le taureau... Violence de la jalousie, violence du désir sexuel, violence de la possessivité... l'amour est-il un combat sans merci?

Jusqu'au 28 mai, avec Sylvie Brunet dans le rôle titre, Nikolai Schukoff, Genia Kühmeier, Teddy Tahu Rhodes, Gaële Le Roi, Nora Souzourian... Diffusé le 14 juin à 20h sur France Musique.


12 mai 2007

Bulle dorée

Il est trop tard pour vous raconter la première de Carmen au théatre du Châtelet hier soir... Quelques photos pour vous mettre quand même dans l'ambiance, et me replonger dans les souvenirs de ces moments délicieux avant d'aller me coucher!
L'opéra, c'est un peu comme le champagne.
Ca vous monte à la tête très vite.
Dès les premiers mouvement de l'orchestre, après les cacophonies des accords, lorsque le chef lève sa baguette, une intense joie prend la gorge, joie du surgissement soudain de l'harmonie et du sens
Et ensuite...
Le coeur répète les mots chantés,
l'âme vole au rythme des mélodies,
le corps tout entier est habité par la musique,
et le torrent des passions incarnées saisit l'être si brutalement!

Comme le champagne,
de lègères et vives bulles dorées qui fusent le long du cristal...
Le léger engourdissement,
le sentiment de ne plus être vraiment astreint à la stricte finitude du monde...



08 mai 2007

Fêtes johanniques à Orléans

Funny Friend, Ulrich et moi-même nous en sommes mis plein les mirettes cet après-midi.

On est allés assister au cortège des fêtes johanniques d'Orléans! La ville est toute belle, pavoisée et les drapeaux claquent dans le grand vent. Partout de vives couleurs, hermines et fleurs de lys. De quoi nous réjouir et nous exalter.

Jeanne la Lorraine est la patronne de la ville depuis qu'elle l'a libérée de l'occupation anglaise, le 08 mai 1429. Elle avait alors... 17 ans! Elle mourrut deux ans après, condamnée comme on le sait au bûcher, le 30 mai. C'est pourquoi l'Eglise catholique célèbre le 30 mai celle qu'elle a instituée patronne secondaire de la France.
Le personnage de Jeanne est passionnant.

Ste Jeanne d'Arc: une figure qui recoupe bien des mythes, qui cristallise bien des aspirations. Une certaine idée de la France aussi, pitoyablement portée aux nues par le FN et consorts, ce qui lui donne un parfum un peu moisi au nez de certains... Ainsi, depuis la fin des années 1990, un groupe libertaire propose à Orléans de "Contre fêtes johanniques", pour offrir une alternative à ce qu'ils estiment sûrement comme la mascarade par excellence des pouvoirs et insitutions en tous genres...
Effectivement, il faut aimer les grandes pompes et les uniformes d'apparat. Nous, on adore, ça tombe bien. En tête, Jeanne d'Arc, en armure s'il vous plaît, sur son cheval, puis un cortège de figurants en habits du moyen âge. Suivent les officiels, généraux, édiles... L'invité d'honneur, qui cette année était une invitée, et fit polémique: Mme Carrère d'Encausse.
Enfin, nous aperçevons des aubes blanches, des banières et des enfants de choeur en robe cramoisie! C'est le cortège des ecclésiastiques, avec notre évêque Mgr Fort, complètement magnifique dans sa soutane d'apparat, avec sa ceinture violette qui vole au vent. Dommage, il n'a pas son grand habit tout violet, avec ses dentelles (déception, légitime, de Funny Friend!). Mais ne soyons pas trop puristes, une belle soutane, ça vous change un homme: nous sommes enchantés!
Le porte croix et le groupe des religieux va saluer Jeanne et lui porter quelques fleurs... Suivent les élus locaux, les magistrats, les universitaires, les pompiers, les anciens combattants, les judokas, les danseuses de flamenco, j'en passe... Une joyeuse synthèse de la vie locale en sorte, assez pédagogique civiquement parlant.
Fin d'après-midi à l'hôtel de l'Abeille autour d'un chocolat, dans ce si cosy salon de thé décoré de Jeanne(s) d'Arc de toutes les formes! Un ravissement de plus.
Et vous savez quoi mes petits chéris? La tradition veut que le président de la République élu dans l'année précédente soit l'invité d'honneur des fêtes johanniques d'Orléans! Nul doute que notre Sarkozy nouvellement élu viendra réveiller l'esprit de Jeanne et réhabiliter l'identité nationale qu'elle symbolise de façon parfois ambigüe.
Alors, rendez-vous l'année prochaine?

07 mai 2007

Rhubarbe à Paris!

Mes parents seront à Paris ce week-end du 12 et 13 mai pour proposer aux parisiens de tout poil leurs délicieux produits à base de Rhubarbe:


Confitures
Gelées
Compotes
Nectars
(jus de fruit: rhubarbe seule ou rhubarbe abricot, rhubarbe fraise, rhubarbe framboise!)

Sirop
Rhubarbulle
(jus de fruit pétillant)


N'hésitez pas à leur faire une petite visite de ma part!
Samedi 12 et dimanche 13
sur
le Marché des producteurs de pays,
Boulevard de Reuilly (XIIème arrdt)

Un petit bonus: quelques recettes de coktails à base de nectar de rhubarbe.
Le « Barbe Rouge »
1/3 de vin rouge : un bordeaux est parfait
2/3 de Frambarbe
Une variante du cocktail à la vodka parfaite pour les amateurs de fruité qui ne veulent pas finir avec une gueule de bois.

Le Martini Rhubarbe
1/3 de Martini « rosato »
2/3 de Nectar de rhubarbe ou de Rhubarbulle pour un effet « Martini Tonic »
Glaçons… et l’olive !

Le Kir Rhubarbe
1/10 de sirop de rhubarbe
9/10 de cidre (pour une touche armoricaine), de Vouvray ou de Montlouis (pour les rabelaisiens) ou de tout autre vin blanc mousseux.
Un grand classique festif qui fait toujours plaisir ; surtout dans une version originale comme celle-ci. Vous êtes sûrs de surprendre vos invités !

Le Punch Rhubarbe
1/6 de sirop de rhubarbe
2/6 de bon rhum blanc
3/6 de Nectar de Rhubarbe
Préparer à l’avance et laisser les arômes se développer avant de servir… Attention, comme tout punch, il est un peu traître !
Pour les inconditionnels, il y a aussi la version brute :
1/6 de sirop de rhubarbe
5/6 de rhum blanc
Attention la tête !
Le demi-rhubarbe
1/10 de sirop de rhubarbe
9/10 de bière blonde
Le « Barbe Bleue »
1/6 de Gin
5/6 de Rhubarbulle très frais
1 goutte de Curaçao pour la touche bleue…
Une variante de l’eau bleue à la mode de chez nous.
Le « Russ’Barbe » ou la « Brit’Rhub »
1/6 de Vodka russe ou de Gin anglais !
5/6 de Nectar ou Frambarbe ou Rhubabricot ou Rhubarbulle très frais
L’ « Irish Rhubarbe »

1/8 de Whisky ou de Crème de Whisky (Bailey’s)
7/8 de Nectar de rhubarbe
Un grand classique qui a tout de suite séduit nos clients, dry ou on the rocks…
Le « Barbe Rousse »

1/8 de Cointreau ou de Grand Marnier
7/8 de Rhubabricot
Décorer le verre avec une rondelle d’orange
L’auvergnate

1/5 de Gentiane (Avèze ou de Suze)
4/5 de Rhubarbulle très frais
Une association surprenante, qui séduira même les sceptiques de la gentiane.

Ecrasant


Dans mon village, 1311 inscrits, 1131 votants, 1078 votes exprimés, soit 95% de participation.
Nicolas Sarkozy 678 voix, soit 62,83% des suffrages.
Ségolène Royal 400 voix, soit 37,11% des suffrages.

Ill: allégorie de la République, place de la République, Orléans.

03 mai 2007