13 octobre 2006

La résurrection, ou l'arsenal démembré

Je suis fascinée par l'évangile d'aujourd'hui, qui me replonge dans mon exaltation girardienne de l'année passée. C'est un texte énigmatique et difficile, dense, de Luc (11, 15-26). Je ne veux pas me lancer dans une éxégèse à l'heure du déjeuner, mais je crois très fort aux fruits spirituels de ce texte, alors déjeunons évangéliquement!
Attardons nous, si vous le voulez bien, sur l'image du guerrier.
"Quand l'homme fort et bien armé garde son palais, tout ce qui lui appartient est en sécurité. Mais si un plus fort intervient et triomphe de lui, il lui enlève l'équipement de combat qui lui donnait confiance, et il distribue tout ce qu'il lui a pris. Celui qui n'est pas avec moi est contre moi ; celui qui ne rassemble pas avec moi disperse".
René Girard souligne combien il est regrettable que les chrétiens ne parlent pas de Satan. Ils abandonnent le sujet aux fantaisistes dépressifs de tout poil avec une complaisance déconcertante. Hummm. Pourquoi donc, et comment, parler de Satan? Comme en tout point dans notre foi, il est nécessaire de tenir un juste milieu. Il est aussi mauvais de ne parler que de l'ange apostat, puisque celui-ci est vaincu par le Christ, que n'en jamais toucher mot. Effectivement, Satan déjà vaincu se débat avec la rage du désespoir, et si son pouvoir est limité, il ne nous empoisonne pas moins la vie! Savoir reconnaître ce pouvoir avec justesse est, je crois, une des clefs de la joie.
Une de mes grandes découvertes spirituelles de l'année passée, suite à la lecture de ce texte commenté par Girard, a été de découvrir le pouvoir libérateur de la reconnaissance de Satan. Satan est ce guerrier blindé qui se tient sur le chemin de ronde de la Jérusalem Céleste, essayant par tous les moyens de nous empêcher d'en franchir les portes! Le Malin a besoin d'armes, car il se sait vaincu; il assoit son pouvoir sur des artifices impressionnants. Ce que Girard met bien en valeur, c'est que les Ecritures Saintes nous apprennent à reconnaître cet arsenal satanique. Effectivement, le Christ a terrassé Satan, "il lui enlève l'équipement de combat qui lui donnait confiance, et il distribue tout ce qu'il lui a pris": il NOUS le distribue, et nous luttons à armes égales avec le Diable. Cette spiritualité du combat, je trouve celà très beau, d'une belle virilité (Funny Friend, tu me comprends)... Armés de cette intelligence du Christ, qui nous aide à discerner de la vérité de Satan, nous devenons capables de "le voir tomber comme l'éclair"! Phrase foudroyante qui devrait parler à chacun de façon concrète...
Le Christ ressuscité est celui qui nous ouvre un chemin d'unité en nous donnant les clefs des artifices sataniques de division et de dispersion. Combat pour l'unité intérieure qui est le chemin à suivre pour préparer l'unité de tous en tous au dernier jour (le Royaume Millénaire musilien!). Mais combien est vraie la conclusion du texte de Luc!
"Quand l'esprit mauvais est sorti d'un homme, il parcourt les terres desséchées en cherchant un lieu de repos. Et comme il n'en trouve pas, il se dit : 'Je vais retourner dans ma maison, d'où je suis sorti.' En arrivant, il la trouve balayée et bien rangée. Alors, il s'en va, et il prend sept autres esprits encore plus mauvais que lui, ils y entrent, et ils s'y installent. Ainsi, l'état de cet homme est pire à la fin qu'au début".
Plus nous appartenons à l'unité du Christ ressuscité, plus nous sommes assaillis par le "Diabolos", celui qui divise. Heureusement, l'Eucharistie fortifie tout notre être, et l'Esprit Saint fait le ménage. Bon appétit!

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Très chère toi,

Belle interprétation du texte de l'Evangile de ce Vendredi qui au 7 aura ouvert une nouvelle année !

Le combat spirituel il est urgent d'en parler parce que ce n'est pas quelques chose de vaporeux ou de réservé au plus grands mystiques. Non, le combat entre soi et l'esprit du mal c'est bien tous les jours ! La fin de ton interprétation reprenant le texte de Luc m'a déconcerté et a failli me décourager cinq minute (parce tellement vraie aussi...). Et puis aussitôt je me suis dis : la bataille est déjà gagnée, Christos anesti, Christ est ressucité !!

Pax et gaudium.
FF.

PS : merci pour le clin d'oeil sur la virilité !

Sémiramis a dit…

De rien FF, tout le plaisir est pour moi. Je célèbre dignement la fête de ma patronne aujourd'hui en rendant grâce à Dieu pour toutes ses grâces spirituelles et intellectuelles. Virilement tienne,
Elise Thérèse des petits pieds de Jésus**

Anonyme a dit…

Ton "exaltation giscardienne" ??? (je plaisante...)

Le pouvoir libérateur de la reconnaissance de Satan... J'adore cette formule.

Anonyme a dit…

J'inaugure ici ma (re)découverte de tes textes portant sur la théologie. Ah, Satan... superbement mis en scène par Scorsese dans "La dernière tentation du Christ", dont il faudra bien un jour que je me décide à parler sur le Systar, puisque c'est l'un des films qui ont été essentiels pour moi, dans la foi première, la parenthèse athée et le retour à la foi.
Enfin, l'article ne vaudra pas une belle méditation sur le vortex... ;-)
Bises,

Bruno

Sémiramis a dit…

Ravie de voir que tu continues à explorer le journal de l'homme sans qualités Bruno...

Au fait, as tu lu René Girard?

Il va falloir que tu me fasse découvrir ce film que je ne connais pas (j'ai une piètre culture cinématographique).

A très vite!