28 décembre 2007

Antoine et Fabrizio - L'héritier et le parvenu

Pour Jean-Baptiste
Il est temps de parler enfin de choses un peu intelligentes sur ces pages, sous peine terminer l'année sur des futilités innocentes. Je tente donc une audacieuse réflexion rapprochant les deux romans dernièrement lus et aimés, rapprochement qui pourra sembler improbable tant Antoine Bloyé et son auteur révolté Paul Nizan ont peu à voir avec l'aristocrate désabusé Tomasi di Lampedusa, père du Guépard.
Improbable, certainement; malgré tout ces deux livres ont le trait commun de mettre en scène des hommes en prise avec leur classe sociale, qui subissent à la fois le poids du passé et les bouleversements d'un monde en pleine mutation. Personnages qui peuvent nous aider à réfléchir sur l'identification d'un individu à sa classe. Entre le prince Fabrizio, l'aristocrate qui constate avec lucidité la décadence de sa lignée et du monde qui l'a portée, et l'ingénieur embourgeoisé, Antoine, arraché à la condition ouvrière par un ascenseur social plus subi que choisi, le jeu de miroir est troublant.

Les deux livres se prêtent à cet exercice, étant axés sur la vie de leur personnage principal qui est aussi le point de focalisation de la narration - et qui porte le titre de l'ouvrage. Ils déploient le même cadre historique, celui d'une montée en puissance de la bourgeoisie, incarnée par le personnage de don Calogero dans le Guépard, qui se manifeste pleinement lors d'une scène théatrale:
"Le Prince avait toujours tenu à ce que le premier dîner à Donnafugata [son fief] eût un caractère solennel [...] Il ne transigeait que sur un détail: il ne mettait pas d'habit de soirée pour ne pas embarrasser ses hôtes qui, évidemment, n'en possédaient pas. Ce soir-là, dans le salon dit "de Leopoldo", la famille Salina attendait les derniers invités [...] Tout était paisible et comme à l'accoutumée, lorsque Francesco Paolo, le fils de 16 ans, fit une irruption scandaleuse dans le salon: "Papa, don Calogero est en train de monter l'escalier. Il est en frac!"
Tancredi évalua l'importance de la nouvelle une seconde avant les autres; il était occupé à ensorceler la femme de don Onofrio, mais quand il entendit le mot fatal, il ne put se retenir et éclata d'un rire convulsif. Le Prince au contraire ne rit pas, lui à qui, il faut le dire, la nouvelle fit plus d'effet que le bulletin du débarquement à Marsala. Ce dernier avait été non seulement un évènement prévu, mais aussi lointain et invisible. A présent, sensible comme il l'était aux présages et aux symboles, il contemplait la Révolution en personne dans ce noeud papillon et cette queue-de-pie noire qui montaient l'escalier de sa maison. Non seulement, lui, le Prince, avait cessé d'être le plus grand propriétaire de Donnafugata, mais il se voyait aussi contraint de reçevoir en costume d'après-midi un invité qui se présentait, à bon droit, en habit de soirée.
Son abattement fut grand et durait encore tandis qu'il avançait mécaniquement vers la porte pour reçevoir l'invité. Mais quand il le vit, ses souffrances furent plutôt allégées. Parfaitement adéquat en tant que manifestation politique, on pouvait cependant affirmer que, quand à la réussite de sa confection, le frac de don Calogero était une catastrophe. Le tissu était très fin, le modèle récent, mais la coupe était tout simplement monstrueuse. Le Verbe londonien s'était très maladroitement incarné en un artisan de Girgenti auquel l'avarice tenace de don Calogero s'était adressée. Les pointes des deux pans se relevaient vers le ciel en une supplication muette, le grand col était informe et, quoique ce soit pénible, il faut bien le dire, les pieds du maire étaient chaussés de petites bottes à boutons."
Le Guépard, II, p. 80-81 (c'est moi qui souligne)
L'écroulement du monde du Prince, politiquement marqué par le fameux débarquement de Garibaldi sur les côtes siciliennes, s'incarne dans ce parvenu ridicule - à la fille duquel il mariera pourtant son neveu chéri, Tancredi au nom si héroïque! La saveur inimitable de cette description tient peut-être à l'amertume explicite de Lampedusa, l'aristocrate, devant l'accession au pouvoir, par le biais de la république, d'une classe aussi piètrement symbolisée. Le Guépard est l'héritier d'une lignée, d'un monde qui vont disparaître avec lui: et il n'en est que trop conscient. Le Prince, relayé par le narrateur, contemple avec un regard féroce les filles de l'aristocratie sicilienne, écrasées par la beauté d'Angelica, la fille de don Calogero, fiancée de Tancredi:
"Mais les autres... heureusement que des tenèbres de Donnafugata avait émergé Angelica pour montrer aux Palermitaines ce qu'était une belle femme.
On ne pouvait pas lui donner tort: dans ces années-là, la fréquence des mariages entre cousins, dictés par la paresse sexuelle et les calculs terriens, la rareté de protéines dans l'alimentation aggravée par l'abondance d'amidon, le manque total d'air frais et de mouvement, avaient remplis les salons d'une foule de jeunes filles incroyablement petites, invraisemblablement olivâtres, insupportablement gazouillantes; elles passaient leur temps coagulées entre elles, ne lançant des appels en choeur aux jeunes hommes apeurés, destinées, semblait-il, à ne servir que de toiles de fond aux trois ou quatre belles créatures qui [...] passaient en glissant comme des cygnes sur un étang rempli de grenouilles. Plus il les voyait plus il se sentait irrité; son esprit habitué aux longues solitudes et aux pensées abstraites finit par lui procurer, à un moment donné, une sorte d'hallucination alors qu'il traversait une longue galerie en passant devant un pouf* central où s'était rassemblée une colonie de ces créatures: il lui semblait être le gardien d'un jardin zoologique en train de surveiller une centaine de jeunes guenons: il s'attendait à les voir tout d'un coup grimper aux lustres, et là, suspendues par la queue, ses balancer en exhibant leur derrière et en lançant des coquilles de noisettes, des cris et des grincements de dents sur les pacifiques visiteurs.
Etrangement, ce fut une sensation religieuse qui le détourna de sa vision zoologique: en effet, de ce groupe de guenons en crinolines, s'élevait, monotone et continue, une invocation sacrée: "Marie! Marie!", s'exclamaient perpétuellement ces pauvres filles [...] Le nom de la Vierge, invoqué par ce choeur virginal, remplissait la galerie et changeait de nouveau les guenons en femmes, parce qu'il ne semblait pas encore que les ouistitis* des forêts brésiliennes se soient converties au Catholicisime"
Le Guépard, VI, p. 234-235 (c'est moi qui souligne)
Il y a quelque chose de morbide dans cette classe décadente, que la vitalité sans scrupules et sans éducation d'Angelica vient balayer d'un revers de main gantée. Mais il faut absolument lire le dernier chapitre du roman pour lire l'histoire des propres filles du Prince...

Au long d'Antoine Bloyé, l'image de la bourgeoisie est celle d'un idéal proposé à ce fils d'ouvrier dont on fait par la force de l'école républicaines, pour les besoins de la nation en techniciens obéissants, un ingénieur.
"Tout encourageait alors la jeunesse ouvrière, les descendants ambitieux des artisans, des petits fonctionnaires, à entrer dans le complot du commandement; Antoine y avait été entraîné comme les autres et il ignorait tout des ressorts qui tendaient cette grande entreprise, il ne savait pas qu'il faisait avec bien d'autres adolescents de son âge un des enjeux de la vaste partie que commençaient à engager les principaux maîtres de la bourgeoisie française. On lui avait dit simplement qu'il pourrait échapper à la misère, aux incertitudes ouvrières, et ces promesses avaient trop bien répondu aux tentations que sa ville lui offrait pour qu'il se refusât à les entendre. Il ne savait rien"
Antoine Bloyé, V, p. 68 (c'est moi qui souligne)
Parvenu, Antoine Bloyé ne parvient pas à surmonter la contradiction interne qui l'habite entre la conscience d'une trahison envers sa classe et l'impossibilité de se reconnaître dans la bourgeoisie:
"C'étaient des hommes prêts à tuer des ouvriers. Antoine les détestait, mais il leur donnait des conseils pour briser sans violences la grève des ouvriers. Je suis mon propre ennemi, se disait-il. Cette division de lui-même, ce déchirement de sa vie, cet abîme qui séparait sa jeunesse de son âge mûr, ce malheur éclataient dans ces conciliabules avec les policiers"
Antoine Bloyé, XIV, p. 208 (c'est moi qui souligne)
A l'inverse de Fabrizio Salina, trop enraciné, chargé de trop d'histoire, Antoine est un déraciné, symbolisant la construction d'une civilisation qui se coupe de ses racines pour monter en puissance plus vite - trop vite. Quand la famille Salina est encombrée d'un chateau absurde dont on ne connaît même pas toutes les pièces, comme d'une histoire dont le contenu ne signifie plus rien, Antoine est expulsé de son monde familial par son ascension sociale, qu'il n'a finalement pas désirée:
"Toutes les possessions terrestres des Bloyé auraient tenu sur une charrette à bras:
"C'est bien assez bon pour des vieux comme nous", disaient-ils.
A mesure qu'ils vieillissaient, les surface de leur vie diminuait encore, cette vie qui avait toujours été si mince, si peu importante, qui avait éveillé si peu d'échos, touché de ses ondes si peu d'êtres [...] Tous les ans, trois ou quatre jours par an, Antoine retrouvait les meubles, les fantômes des mouvements, les vestiges des pas de son enfance [...] Il songeait qu'on ne vit guère avec les gens qu'on aime, trois jours, quatre jours par ans, quelle dérision! Il leur demandait de venir passer l'hiver chez lui, mais ils refusaient, ils disaient:
"Nous vous gênerions..."
Car ils avaient pris l'habitude de vivre avec un fils imaginaire qui leur semblait trop haut placé pour eux. Les souvenirs d'enfance, les nouvelles du village épuisées, ils n'avaient pas grand-chose à lui dire. Ils étaient chacun dans un monde"
Antoine Bloyé, XVIII, p. 256 (c'est moi qui souligne)
Il s'agit pour nous d'assumer cet "héritage précédé d'aucun testament", car, d'un monde à l'autre, entre décadence et déracinement, c'est à la naissance de notre propre civilisation, républicaine et démocratique, technicienne et aculturée, que nous sommes conviés.

23 décembre 2007

Où l'on voit Noël être honteusement détourné (avec un machiavélisme très féminin)

Noël, Noël, demain, c'est Noël!




J'ai installé ma mini-crèche dans ma mini-iconostase. Et puis, j'ai même un mini-sapin!
Les cadeaux sont emballés. Le champagne est au frais.

Il ne manque rien...
ah, oui... sous le sapin... les chaussures!



Le conseil glamour de Noël:
un mini-sapin exige d'être assorti avec des maxi-talons.


Mettre ses souliers sous le sapin: voici un impératif qui sussure à l'oreille de tentatrices suggestions lorsque l'on passe l'insu de son plein gré devant les vitrines illuminées, dans le matin (sombre) et la (sombre) soirée. Est-ce une nouvelle preuve de la corruption définitive du sexe féminin?


Joyeuse fête de Noël (à tous ceux qui en profiteront vraiment, on ne la souhaite pas trop pénible pour les autres...)

19 décembre 2007

Et en plus il est bel homme...

Avantage de mon nouveau métier autre que celui de boire du champagne aux frais de la princesse, celui de voir en vrai ce que c'est des gens exceptionnels. Après Jean-Cyril, c'était au tour de Jean-Bernard hier lors de la grand messe investisseurs de la maison Wendel. Jean-Bernard Lafonta est le président du directoire de la prestigieuse société familliale depuis le départ d'Ernest-Antoine Seillière (contrairement à Jean-Cyril, on constate la présence des boutons de manchette...).


Il est intelligent, très intelligent, avec une certaine distance pleine d'humour dans sa façon de parler, il dégage une sérénité puissante, confiance sans prétention, et, et, et en plus... il faut vraiment le voir sourire. Cela vaut largement une pâmoison blogesque.

17 décembre 2007

Parenthèse hivernale

Sainte Blandine (79) - Enfin un peu de soleil et un froid vif qui fait rosir les joues. Les arbres nus dessinent de graciles et vaines architectures sur l'étendue nette du ciel.


Les petits murs de pierres sèches, patiemment assemblées, dégoulinent de lumière!




Le terroir deux-sèvrien est ponctué de ces dignes cyprès, gardiens des cimetières familiaux des protestants, plus ou moins enfouis sous les herbes folles, ou amoureusement entretenus. Une persécution telle ne s'efface pas avec les siècles...

La terre rouge, ourlée de haies et de chemins creux, est si différente de ma terre natale, et je m'étonne toujours de son absence de lourdeur.

Dans la pureté tranchante de la lumière, tout semble simple et beau, comme un dimanche, jour de création et de résurrection.

12 décembre 2007

Lequel des deux...


Gérard Miller analyse le discours de Nicolas Sarkozy le 1er mai 2007... Lequel vous fait le plus peur?

07 décembre 2007

Bonne nouvelle en temps d'avent


Merci à Eric qui m'a communiqué l'info réjouissante: Mgr Le Vert est nommé évêque de Quimper et Léon. Quelle belle idée du Vatican de fixer cet ancien officier de marine dans un pays qui lui est cher... Je me réjouis pour lui et pour son diocèse qui va accueillir un pasteur exceptionnel!

"Sous son regard, dans l'amour"
Galates 1, 4

03 décembre 2007

L'article ne donnait pas de nom, mais chacun comprit


Dans le journal mural affiché dans le vestibule de l'Institut de physique, parut un article intitulé: Toujours avec le peuple.
On y racontait que l'Union soviétique, guidée à travers la tempête de la guerre par le grand Staline, accordait une énorme importance à la science, que le parti et le gouvernement entouraient les hommes de sicence, comme nulle part au monde, d'honneurs et de respect, que même durant la difficile période des hostilités, l'Etat soviétique offrait aux savants toutes les conditions d'un travail normal et fructueux.
On évoquait, plus loin, les tâches grandioses qui attendaient l'Institut, les constructions nouvelles, l'agrandissement des anciens laboratoires, le lien entre la théorie et la pratique, et le rôle joué par les chercheurs dans l'industrie de la défense.
On mentionnait l'enthousiasme patriotique, qui soulevait le collectif des chercheurs scientifiques et les poussait à justifier les soins et la confiance, dont les entouraient le parti et le camarade Staline en personne, à ne pas déçevoir l'espoir que le peuple fondait sur cette glorieuse avant-garde de l'intellegentsia soviétique: les hommes de science.
La dernière partie de l'article était consacrée au fait que, malheureusement, on trouvait, dans ce collectif sain et fraternel, des individus isolés qui n'avaient pas le sens de leurs responsabilités à l'égard du peuple et du parti, des gens coupés de la grande famille soviétique. Ils s'opposaient à la collectivité, plaçaient leurs intérêts personnels au-dessus des tâches que le parti confiait aux savants, ils étaient enclins à grossir leurs mérites scientifiques, réels ou illusoires. Volontairement ou non, certains se faisaient les porte-paroles de points de vue et d'opinions non soviétiques, étrangers, se targuaient de leurs liens avec eux, rabaissant, par là même, la fierté nationale des savants russes, et les mérites de la science soviétique.
Il leur arrivait de poser aux défenseurs de la justice bafouée, afin de s'assurer à bon compte la reconnaissance de gens confiants, imprévoyants et naïfs. Mais en réalité ils semaient, dans la science soviétique, des graines de discorde, de méfiance, d'irrespect pour son passé et ses noms les plus glorieux. L'article appellait à liquider toute forme de pourriture, tout ce qui était étranger et hostile, tout ce qui empêchait la réalisation des grandes tâches confiées aux savants, durant la Grande Guerre patriotique, par le parti et le peuple. L'article s'achevait par ces mots: "En avant, vers de nouvelles conquêtes de la science! Suivons la voie glorieuse, brillamment éclairée par le phare de la philosophie marxiste, la voie sur laquelle nous guide le grand parti de Lénine et Staline!"
L'article ne donnait pas de nom, mais chacun comprit, au laboratoire, qu'il s'agissait de Strum
.

Vassili Grossman, Vie et destin, III, 20
(p. 628-629 de l'édition pocket)

26 novembre 2007

Ah les cathos, ces barbares!

A lire absolument, et rire sans se retenir, sur la Boîte à images! Un exposé tordant et instructif qui viendra vous divertir, et vous instruire, pendant ces longues et désespérantes soirées de novembre... et vous ne regarderez plus jamais les crucifix pareil!
Merci à Ter!

25 novembre 2007

Fête du Christ Roi - fin de l'année liturgique


Le Christ, roi de l'univers: c'est sur cette fête méconnue que l'Eglise catholique clôt l'année liturgique. Il est vrai que les catholiques eux-mêmes sont mal à l'aise avec tout ce qui concerne la parousie et la fin des temps... Et pourtant, cette fin d'année est là: elle redonne son sens à l'histoire humaine telle que la liturgie la représente symboliquement, elle rend manifeste l'espérance de la fin des temps qui anime le coeur de l'Eglise.
Dès la semaine prochaine, nous entrerons dans le temps de l'avent, temps de l'attente de l'apparition de la lumière née de la lumière à Noël.
"Frères, rendez grâce à Dieu le Père, qui vous a rendus capables d'avoir part, dans la lumière, à l'héritage du peuple saint. Il nous a arrachés au pouvoir des ténèbres, il nous a fait entrer dans le royaume de son fils bien aimé" Colossiens, 1, 12
Une occasion de constater combien le calendrier catholique inscrit le temps humain dans le projet de Dieu, d'une attente messianique à une autre, entre espérance d'un roi juif et avènement d'un roi cosmique qui règnera sur l'univers réconcilié.
"Car Dieu a voulu que, dans le Christ, toute chose ait son accomplissement total. Il a voulu tout réconcilier par lui et pour lui, sur la terre et dans les cieux, en faisant la paix par le sang de sa croix" Colossiens, 1, 20
Une occasion aussi de se rappeller que la royauté du Christ nous est donnée en partage lors de notre baptême, qui nous consacre prêtre, prophète, et roi. Mais quel est le sens de cette royauté au coeur de nos vies, sinon celui d'une force surgie de nulle part, d'une autorité inattendue, à l'image de celles du roi David, l'enfant chéri de Dieu, reconnu par tous comme l'oint du Seigneur?

22 novembre 2007

Pour consoler Michel Onfray...

... et parce qu'on n'en est plus à un paradoxe près, pour illustrer les brillantes formules de notre athéologue fétiche que nous offrait JB
"les montages entrepreneriaux de patrons voyous qui incarnent la persistance de la tradition négrière [...] les tenants du libéralisme s’évertuent à le rendre caduc jour après jour en démontant ce qui reste de 1789 et autres moments de l’histoire de la gauche" (Libération ce jour)
je vous propose un hommage à un grand patron de gauche, Jean-Cyril Spinetta.

J'étais assez curieuse de découvrir, cet après-midi, le personnage lors de la présentation semestrielle des résultats d'Air France KLM... Je n'ai pas été déçue.
Grand espace bleu (roi) central, éclairages rouges et blancs de chaque côté, grande table en forme d'autel du même bleu triomphant, exactitude pointilleuse et orchestration précise: la messe était belle, la liturgie parfaite. Sur le côté s'active une équipe technique, dans une boîte en verre deux traducteurs s'appliquent. Tout est parfait; et au centre, Jean-Cyril Spinetta, ne l'est pas moins.
Difficile de passer à côté d'un tel homme. Un physique qui laisse à penser qu'on lui avait téléphoné pour le dernier James Bond (mais il était déjà pris). Il aurait pourtant fait l'affaire... Une intelligence coupante comme une épée, une parole nette et claire, un charisme à faire exploser son veston (bleu évidemment): on sent tout de suite qui est le chef et que ce la place n'est pas usurpée. Sobre et convaincu.
Voila donc ce que c'est, un grand patron de gauche. Je me demande finalement si le signe caractéristique qui le distingue du grand patron de droite n'est pas l'absence de boutons de manchettes?

19 novembre 2007

Jubilate omnis (en lisant les Echos)

Emballer et déballer, tel est le destin d'une fille qui déménage. Mais quand il s'avère que la providence l'a équipée d'un cerveau, il arrive que parfois même une activité aussi fruste puisse apporter quelque matière au au flux continuel de sa pensée.
Emballant et déballant donc, je tombe pas plus tard qu'hier sur une page des Echos dont le titre me tape à l'oeil : "La science et le retour du religieux, grand angle avec le philosophe Jacques Bouveresse" (numéro du 2 et 3 novembre). Emoustillée par la chose, je sauve le professeur du collège de France de l'humilliation, renonçant à l'idée de réduire ce grand angle si prometteur au statut d'un cale saladier, et me délecte d'une passionnante lecture. A vrai dire, je ne connaissais le bonhomme que de nom, et de réputation musilienne (ce qui était déjà à soi-seul révélateur); et en lisant cet entretien, j'ai eu un grand moment de jubliation.
Le chapeau annonce la couleur avec grandiloquence :
"A l'heure où l'on assiste à un retour en force des religions, où le rationalisme est malmené par les pseudos-sciences et les croyances de toutes sortes, où il est de bon ton de professer un scepticisme de principe face au discours scientifique, le philosophe Jacques Bouveresse livre un plaidoyer en faveur de la vérité et de la raison"
On croit rêver et pourtant c'est vrai: un éminent intellectuel nous dirait que la vérité n'est pas un mensonge ni une fiction? Fichtre, on ne dénoncerait point de complot dissimulateur? Pire encore, on ne fustigerait point l'autoritarisme de la raison? En voilà un qui n'a pas peur d'être inactuel.
D'ailleurs, il fait pan sur le bec des vilains épistémologues qu'on était obligés d'étudier quand on était de dociles étudiants, ceux qui disent que rien n'est vrai, ceux qui nous ont convaincus pendant une seconde que toute assertion, si elle n'est pas un mensonge politique des méchants pour écraser les gentils, est plus ou moins un délire mystificateur. Toutes les assertions et surtout la science.
Mais le plus jouissif, c'est qu'il en met aussi plein la poire de Michel Onfray. Et ça, c'est presque orgasmique tellement c'est subtilement et délicatement fait (j'en frissonne encore).
"Si le rationalisme est aujourd'hui presque complètement désarmé, c'est parce qu'il est supposé, contre toute vraisemblance, occuper une position dominante qui lui permettrait de se comporter de façon autoritaire et tyrannique"
Et pan sur le bec. Après, on tape sur tout et le reste (le Da Vinci Code par exemple, au hasard), et surtout sur la crédulité humaine, et le manque de bon sens général :
"Il n'est pourtant pas difficile de constater que le pouvoir et l'influence sur les esprits ne sont pas à l'heure actuelle du côté de la raison et de la science, mais plutôt du côté des pseudos-sciences, des religions et des mythologies"
Et on en rajoute une couche sur la théorie du complot rationaliste (et sur le dos de Michel Onfray, soupir de contentement...)
"La puissance de l'irrationalisme repose en grande partie sur le fait qu'il a réussi, largement avec la complicité d'une bonne partie du monde intellectuel, à se présenter dans le rôle de la victime. Face au rationalisme, décrit comme un adversaire beaucoup plus puissant qui rêve de l'anéantir, il se présente pour ainsi dire en état de légitime défense. Cette façon de voir est assez sidérante, parce qu'il suffit de considérer d'un peu plus près les affaires humaines pour se rendre compte que ce que l'on a appellé la "lumière de la raison" n'y brille que de façon tout à fait ponctuelle et exceptionnelle. Mais les irrationalistes les plus radicaux sont tout à fait capables de soutenir à la fois qu'elle ne joue aucun rôle réel et que son rôle est beaucoup trop important, voire démesuré"
Le discours de Bouveresse est moins polémique mais tout aussi passionnant lorsqu'il évoque les liens et les conflits entre science, religion et recherche de la vérité. Surtout parce qu'il revendique la réalité de "vérités objectives"... On est soulagé de trouver tant de bon sens dans de si hautes sphères. Je ne suis pas d'accord avec lui, en revanche, lorsqu'il affirme
"[la vérité de la religion n'est pas identique à celle de la science] car il s'agit d'une vérité révélée, donnée d'emblée. Dans [la science] il s'agit d'un horizon ultime vers lequel on chemine par approximations successives. La notion de progrès est cruciale pour la vérité scientifique. En science, la vérité ultime, pour autant que l'on puisse parler de ce genre de chose et espérer y parvenir un jour, ne peut être atteinte, dans le meilleur des cas, qu'à la fin. Pour un esprit scientifique authentique, l'idée d'une vérité absolue et définitive n'a pas de sens réel et c'est précisément, souvent, parce que la science n'est pas en mesure de nous fournir ce genre de vérité qu'on s'en détourne pour chercher refuge dans la religion" [nous soulignons]

Il ne me semble pas que vérité scientique et vérité religieuse soient si éloignées que celà! Même si un croyant sait avoir reçu et détenir, en quelque sorte, LA vérité absolue du monde, elle se présente à lui avant tout comme un mystère dans lequel il ne peut que "cheminer par approximations successives", et "espérer parvenir un jour, [...] dans le meilleur des cas, à la fin", à la "vérité ultime" dans la vision de Celui qui est la source de tout.
La notion de progrès est donc tout aussi cruciale dans la vie du croyant qui recherche la vérité que dans celle du scientifique! En revanche, elle ne l'est pas dans celle de celui qui se crispe sur la foi comme sur un refuge rassurant où les réponses toutes faites empêchent l'éclosion des questions. La foi fonctionne comme un constant questionnement sur une vérité qui nous est donnée mais qui, ontologiquement, nous dépasse: la vérité ne peut représenter, pour le vrai croyant, qu'un "horizon ultime": celui de la vision béatifique, moment où la foi ne sera plus nécessaire puisque "nous serons rendus semblables à Lui en le voyant tel qu'Il est"...

Jacques Bouveresse a récemment publié
Peut-on ne pas croire? Sur la vérité, la croyance et la foi, aux éditions Agone.

15 novembre 2007

Home sweet home

Et voilà! Quelques emballages et cartons plus tard...


...me voila installée dans une nouvelle vie.




Des changements: Jeanne d'arc ne règne plus sur ma salle de bain, mais voisine l'Homme sans qualités.


Tout ça, évidemment, grâce à mon staff de wonderboys déménageurs, conducteurs de camions Super U, transporteurs de chaises dans le tramway, et cireurs de meubles...

Et les 20 ans de mon frère, que j'ai dignement honorés avec ça:

13 novembre 2007

...s'étirait, immense et sans fin...



"L'aube approchait. Le brouillard flottait au-dessus de la Volga et il semblait qu'il avait englouti toute vie.
Soudain le soleil apparut, comme une explosion d'espoir. Le ciel se refléta dans l'eau et l'eau sombre respira et le soleil sembla crier dans les vagues du fleuve. La rive était blanche de givre et les arbres roux ressortaient gaiement sur ce fond blanc. Le vent forçit, le brouillard disparut, le monde avait la trasparence aiguë du cristal, et il n'y avait de chaleur ni dans le soleil éclatant, ni dans le bleu du ciel, ni dans le bleu de l'eau.
La terre s'étirait, immense et sans fin. Et, immense et éternel comme la terre, il y avait le malheur"
Vie et destin, Vassili Grossman, Chap. 25 (p. 129 édition pocket)

01 novembre 2007

Fête de La Toussaint



"Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement. Nous le savons : lorsque le Fils de Dieu paraîtra, nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu'il est. Et tout homme qui fonde sur lui une telle espérance se rend pur comme lui-même est pur"
De la première lettre de st Jean 1, 2-3

30 octobre 2007

Pur, impur et force vitale - la quête du corps païen

Tess d'Urberville, de Thomas Hardy

Il m'a fallu bien du temps pour me décider à lire ce classique qui trainait depuis longtemps dans ma bibliothèque. Et bien des jours, aussi, pour arriver à écrire sur ce livre, tant cette lecture est bouleversante. Pour tout dire, j'ai lu Tess après avoir achevé
L'amant de lady Chatterley, de D.H Lawrence


Ce bouquin m'a complètement mise à côté de mes pompes. C'est l'excellente préface (d'André Topia) de l'édition Folio du roman culte de D.H Lawrence qui m'a orientée vers l'oeuvre de Thomas Hardy. Ces lectures m'ont fait énormément réflechir et j'aimerais parler de ces deux livres dont la filiation apparaît clairement, tant dans la structure narrative que dans les thèmes cruciaux.
Lady Chatterley
semble être une sorte de revanche prise sur l'homme et la société qui écrasent et immolent finalement la pauve Tess d'Urberville comme un agneau prenant sur lui le péché des hommes (hommes est à entendre ici au sens masculin... désolée).
Pour tout dire en un mot l'histoire de Tess est atroce. Pour en dire plus, le roman décrit le chemin de croix d'une jeune et pauvre paysanne, parfaitement pure et naïve, douée d'une grande responsabilité et d'un très haut sens de l'honneur. Tess est d'abord perdue par l'orgueil de son père, ivrogne qui découvre par un malheureux hasard son ascendance aristocratique. Gens simples et irresponsables, ses parents envoient la toute jeune Tess chercher une place dans leur nouvelle "famille": les D'Urberville, et elle y rencontre son "cousin" Alec... qui la perdra en la violant. Enceinte d'un enfant qui mourra rapidement, qu'elle baptisera elle-même dans un accès de folie, Tess se terre dans la honte, dans le sentiment de son indignité et de son impureté définitive.
Mais sa beauté n'a pas dit son dernier mot. Employée dans une laiterie, elle charme Angel, un jeune homme, beau, bon et bien sous tout rapport, qui tombe follement amoureux d'elle et la supplie de l'épouser malgré ses réticences et son refus catégorique. Tentée d'avouer plusieurs fois sa "faute" (qui n'est même pas la sienne), Tess finit par céder à l'amour qu'elle porte à Angel, convaincue qu'il ne pourrait pas ne pas lui pardonner (tant il l'aime). Malheureusement, lorsqu'elle lui avoue au soir de ses noces son impureté, Angel se révèle incapable de surmonter l'image fantasmatique qu'il avait construit de cette femme adorée, qui ne correspond plus à la réalité de son épouse: lâche et faible, il refuse de vivre avec Tess (qui retourne chez ses parents la honte au front) et part au Brésil affronter son destin.


La pauvre Tess se retrouve donc dans une situation absurde, épouse inépousée, contrainte à travailler (dur) et à attendre avec abnégation le moment où son mari voudra bien lui pardonner (!!). C'est là que réapparaît l'abominable Alec, qui entre-temps s'est converti et prêche dans les campagnes la bonne nouvelle de l'Evangile (!!!). La beauté de Tess n'a pas dit son dernier mot (bis), et Alec est repris par son ancienne passion, et poursuit la belle abandonnée avec acharnement, reprenant sa vie et ses instinct de débauche. Il finit par convaincre Tess que son mari ne reviendra jamais: brisée moralement et sentimentalement, elle le suit en ville où elle devient sa maîtresse. C'est là que la trouve Angel, revenu du Brésil le coeur mortifié d'avoir tant fait souffrir celle qu'il a épousée, et qu'il se rend compte avoir toujours aimée - un peu trop tard.
Folle de douleur, Tess poignarde Alec et s'enfuit avec Angel dans une folle errance à travers la campagne, où leur mariage est enfin consommé. Errance qui s'achève sur l'autel du sanctuaire païen de Stonehenge, où la police vient recueillir Tess la criminelle. Le roman s'achève (c'est le pompom de l'atrocité!) sur la perspective de l'exécution de la pécheresse, alors que son mari et sa soeur qu'elle a elle-même liés se prosternent (sic!) et continuent leur route (re-sic).

On retrouve dans Tess le thème à peine dissimulé de la victime immolée par le collectif monstrueux, thème qui ferait dresser le sourcil de René Girard - et il aurait matière d'analyse pour la théorie mimétique dans le roman. Ici c'est peut-être plus spécifiquement la lâcheté et la bêtise des hommes qui crucifie la belle Tess, objet de tant de convoitises et de tant de passions masculines. Il y aurait par conséquent énormément à dire sur le thème du pur et de l'impur dans ce roman. Je crois que je pourrais disserter des heures sur le sens moral de ce texte vraiment bouleversant qui soulève bien des questions douloureuses. Mais ce qui est fondamental, c'est que ces questions se rejoignent dans une écriture vraiment très belle chez Hardy, une description continue de la nature, quasiment impressionniste et qui rappelle curieusement le style de Turner.
Cette description des paysages et de la nature mère, nourricière et vivante, qui fait de certaines pages du roman un sommet de sensualité esthétique, est avant tout une allégorie du corps et de l'âme de Tess... à moins que ce ne soit Tess qui soit l'allégorie de cette nature vierge et généreuse, où rien n'est impur? Nature qui deviendra dure et impitoyable lorsque Tess, abandonnée par Angel, travaille au milieu des pierres, dans le froid. Lorsque son corps déserté par la vie et par l'espoir sombre peu à peu dans une "chosification" accrue par le travail abrutissant, qui va la pousser à sombrer dans la décadence morale. Hardy prend pour objet ce qui deviendra le thème central du roman de Lawrence: celui du corps païen qui lutte pour son épanouissement et l'accomplissement de sa force vitale. Constance est la femme qui prend la revanche de Tess, refusant la logique morbide que lui impose l'infirmité, l'intellectualisme et l'idolâtrie de son époux infirme. Auprès du garde chasse, elle retrouve la source de la force vitale - et du désir de la vie, tout simplement, dans une sexualité presque mystique, en tous cas, sacrée, où elle est ramenée à une sorte de principe féminin.


Mais les deux romans abordent également le thème de l'affrontement entre ce corps vivant, organique, et le corps mécanique de la machine industrielle qui incarne une modernité mordibe. Corps de la batteuse qui va faire de Tess une chose, prête à tomber sans volonté dans les bras d'Alec; corps de la mine qui va devenir le corps par procuration de Clifford, qui n'a pas de pouvoir sur le sien et finit par devenir le "bébé" de son infirmière. L'opposition corps machine / corps vivant renvoie évidemment aussi au caractère social des deux romans, qui évoquent un thème important en Angleterre: celui de la vie rurale, et de l'industrialisation brutale. Egalement, celui des rapports de classes. Entre modernité et traditions rurales se dessine le regret d'une religion païenne idéalisée.
Car ce corps païen, si harmonieux dans son rapport avec la nature, c'est celui de Tess dans sa pureté naturelle, et celui de Constance lorsqu'elle vit dans les bois sa passion sauvage et couvre de fleurs le sexe de son amant. Le jugement explicite des auteurs est le même: ce que vivent leurs héroïnes n'est condamnable que sur le plan d'une loi morale de source humaine. Voire, religieuse... le fait que de telles réflexions sur le corps apparaissent dans un contexte protestant, où le rapport érotique au corps de Dieu, par l'eucharistie, est absent, est assez frappant. Bref, si Tess et Constance sont condamnées par la logique sociale, elles sont en harmonie avec les puissances de la nature, la loi naturelle parle pour elles... Et les références aux temps païens, ceux où les dieux habitaient les forêts (où se nouent les scènes de l'adultère pour Constance et du viol pour Tess), abondent dans les deux romans.


Cependant, si ce discours anti-moral apparaît vraiment juste dans le cadre du roman de Thomas Hardy, où l'on ne peut que compatir aux malheurs de Tess - il est moins évident chez Lawrence. On peine à accepter une telle dichotomie entre le couple conçu socialement, décrit de façon catastrophique, et le couple mythique et mystique qui fusionne dans une sexualité triomphante mais est plus qu'improbable sur le plan humain. Si l'on sort ébranlé de la lecture de ce livre, c'est peut-être parce qu'il rayonne de la conviction que l'amour, et plus loin le couple, ne repose que sur le sexe! Une conception du sexe très impersonnelle, où ce qui compte, ce n'est pas tant la personne que l'on a en face de soi (même si la fin du roman ouvre une petite porte à une relation vraiment personnelle entre les deux amants). Ce qui compte, c'est avant tout ce que le sexe nous donne à vivre: un accroissement de la force vitale, une plénitude radieuse de l'être. Plénitude aussitôt contrariée par l'absence de celui qui nous l'apporte. L'amour ne serait-il alors que ce que décrivait Aristophane dans le mythe du Banquet, la quête désespérée de cette moitié qui va venir fusionner avec notre être, et lui permettre d'échapper à son incomplétude insatisfaite?
Si le personnage de Constance semble réhabiliter le corps païen brisé sur l'autel de Stonehenge, son triomphe pose problème. Le corps rayonnant, le corps radieux n'est pas uniquement un corps accompli par l'épanouissement sexuel, c'est un corps transfiguré par la grâce; et même si la sexualité est une grâce, elle ne suffit pas.

Nota bene: Je précise que je n'ai pas encore vu ni l'un, ni l'autre, des deux films adaptés des romans! Je ne parle ici que des livres.... Avis aux cinéphiles!
Ill:

1- Tess d'Uberville est incarnée par Nastassja Kinski dans le film de Roman Polanski, 1978, Tess.
2- Constance est incarnée par Marina Hands dans le film de Pascale Ferran, L'amant de Lady Chatterley, 2006.
3 - Tess, épuisée par le travail de batteuse, est poursuivie par Alec - dans le film de de Polanski.
4 - Stonehenge, sanctuaire païen qui est le lieu du dénouement de la fuite de Tess et de son mari.
5 - Marina Hands et Hippolyte Girardot (dans le rôle de Clifford) dans la scène de la promenade des les bois.
6 - Marina Hands lors de la fameuse scène sous la pluie...


29 octobre 2007

On ne se baigne jamais deux fois...

... dans la même rivière. C'est le premier ministre qui l'a dit, mais Héraclite avant lui, et ils avaient tous deux bien raison, parce que tout passe dans la vie.
Je quitte dans trois semaines le Crédit Agricole Centre Loire, où j'ai passé un an et demi.
Je rejoins Ethiea Gestion.
Je déménage, en ville, et quitte mes chères étendues de plaines...


Je prépare mon Master II.
Voila, pour ceux qui ont l'habitude de prendre de mes nouvelles personnelles sur ce site... ça bouge, ça bouge. Voila pourquoi les articles "de fond" se font rares ces temps-ci... J'ai pourtant un projet autour de Tess d'Urberville et L'amant de Lady Chatterley.


Il faut dire qu'à part ça, mes lectures sont un peu monopolisées par Simone Weil. Master II oblige...

Entre démission, déménagement, virées chez Darty et élaboration de plan... je vous remercie de votre fidélité!

Et puis, il y a tous ceux dont on ne préfère pas parler...

En guise de conclusion à cette petite série, un hommage discret à ceux qui ne figurent pas dans le top 5...
Ceux qui sont rentrés au noviciat dominicain... perdus pour la cause féminine, donc!
Ceux pour qui on a beaucoup trop cuisiné (et qui se permettaient de faire des commentaires) - trop de ressentiments?
Ceux qui ont du mal à dépasser le modèle de perfection maternelle ?
Ceux qui nous ont toujours invitée au resto à défaut d'autres ressources (c'était bien quand même, hein!)
Ceux dont on n'a pas encore éprouvé les talents...

Exemple 5 - Mon frère, un peu fétichiste

Ce n'est pas parce que mon frère est fan de Mc Do qu'il est pour autant une incarnation de la barbarie gastronomique.


Au contraire, ce garçon aime manger, et il ne lui déplait pas de cuisiner. On se souvient de ses feuilletés épinard chèvre qui, en guise d'entrée, étaient si copieux que nous n'avions plus faim pour la suite! Il est aussi très fort en quiches, lorraine, aux tomates, au thon...


Mais le plus drôle, c'est qu'il a ses petites manies. Par exemple, battre les oeufs très très très soigneusement... pour faire une omelette.




Ou alors, hacher très très très menu des oignons pour faire sa quiche lorraine. Découper, ciseler, quand il se met aux fourneaux c'est pour un grand numéro de perfection. Même ses croque-monsieur (qui se font rare ces derniers temps, d'ailleurs...) frôlent l'extase dyonisiaque.
Il est aussi très diplômé en cocktails, mojitos et Martini en tous genres, pourvu que ce soit décadent et glamour.
Mais il est aussi capable de faire une descente à Super U pour en rapporter 15 pots de compote de pommes, base exclusive de sa nourriture pour quelques temps. Fétichiste, je vous dis...
Certes, il manque à ce jeune homme l'expérience du quotidien mais le moins qu'on puisse dire c'est qu'il n'a pas peur de la fantaisie. Nous lui accordons 8, parce qu'avec une soeur pareille, il ne pourra qu'atteindre la perfection.

24 octobre 2007

Exemple 4 - le perfectionnisme de Romain

Ce nouveau candidat a tout les atouts pour renverser son jury. Notez le sourire , quoiqu'un peu crispé, la technicité du geste! Et l'originalité de la recette, en hors-d'oeuvre: bricks au thon. Pas mal...



Oui, ce garçon est doté l'amour du détail! Il est même raffiné: choisissant avec soin ses recettes et s'attachant à les suivre scrupuleusement. Préparant pour ses amis lève-tard un petit déjeuner mignon (avec le petit brin de muguet because of the premier mai).
Mais attention, ne nous leurrons pas! Une nette touche virile s'affirme, bien attendrissante et qui n'est pas pour déplaire.
Par exemple, on voit sur cette photo notre héros s'étonner de la présence d'une salade feuille de chêne dans le frigo de Paul, et s'essayer à l'essorage sans grande conviction. Oui, Romain, ça se mange ces petites choses vertes frisottées!

En général, Romain brille dans les recettes au fromage (la tarte au maroilles par exemple), les gâteaux qui tiennent bien au corps, les salades composées avec tout plein de trucs dedans. Faut que ça cale le ventre.
On peut toujours compter sur ses talents pour de monstrueux BBQ et des coktails fous-fous.


Ou pour ouvrir une bouteille de blanc lors d'une longue soirée d'été.


Oui, cet homme est magistral! Pour Romain, la cuisine est un défi à relever avec perfectionnisme et moult remises en causes. Peut-être un peu trop parfois? Jamais satisfait par excès de scrupules, toujours trop cuit ou pas assez copieux, trop gras ou pas assez organisé: ce garçon ne s'estime pas à sa juste valeur. Aussi hardi dans les tâches ménagères qu'aux fourneaux, nous lui accordons un presque 9.
8,99 pour Romain, il ne lui manque que la légèreté et ce sera parfait!

18 octobre 2007

Exemple 3 - Thibaut, parfait mondain?

Le prochain cas que notre jury se propose d'étudier est celui de Thibaut. Le jeune homme se plaît à recevoir dans sa garçonnière, disposant sous la reproduction-puzzle des Noces de Cana de Véronèse pléthore de bouteilles, amuses bouches et toast luxueux (avec du saumon, même). Parfaitement décadent, et réellement charmant!


A son actif, des apéros mondains, des blend rhum-banane (à 17h de l'après-midi, quelle audace!): Thibaut est l'hôte attentif et attentionné qui ne laisse point le verre se vider sans revenir gracieusement vous servir, et vous comble de petits beurres et de biscuits en tous genres.
On notera malgré tout la présence sous la table d'apparat de la poubelle un peu négligée. Il est vrai que notre homme n'a pas encore eu l'occasion de faire ses preuves: on demande à voir un vrai dîner, et n'ayant jamais vraiment cohabité avec lui, il est difficile de préjuger de ses aptitudes au partage des tâches. Nul doute que ce garçon devenu homme fera un parfait mondain, prêt à servir un scotch à ses collègues dans le fumoir, mais sera-t-il à même de mixer la purée carotte-brocoli du petit-dernier? S'il a prouvé un certain talent pour l'hospitalité, résistera-t-il à l'épreuve morne et répétitive du quotidien?
Capable tout de même de préparer une entrecôte sauce roquefort, on peut espérer le meilleur. Au bénéfice du doute, on lui décerne donc un 8 encourageant.