15 janvier 2008

Trois regards sur Etty Hillesum

Publiée dans la revue la Vie Spirituelle ce mois-ci, voici une recension d'un petit ouvrage sur Etty Hillesum, dont je vous recommande avant tout la lecture des journaux et lettres publiés au Seuil sous le titre Une vie bouleversée...


Il en va des ouvrages de commentaire comme des effets de styles : certains mettent en lumière des aspects jusqu’alors inaperçus d’une personnalité ou d’une oeuvre, tandis que d’autres viennent se surajouter à un ensemble déjà riche de sens et accessible comme tel. Ainsi, le lecteur déjà familiarisé avec le journal et les lettres d’Etty Hillesum éprouvera peut-être un sentiment de redondance en se plongeant dans le petit collectif que nous proposent les éditions Arfuyen.
Croisant les regards du père carme D. Sterckx, du poète - et traducteur de Rilke - C. Vigée, et de l’écrivain et dramaturge C. Juliet, préfacé par Liliane Hillesum - cousine d’Etty, il conviendra de préférence aux néophytes, désirant plus découvrir à la fois une personne et une spiritualité que de se plonger dans une analyse conceptuelle. L’approche, volontiers hagiographique, privilégie l’évocation d’une personnalité dont la richesse et la profondeur de la spiritualité se révèle sans fioriture dans ses écrits. Le risque de cette option de travail étant de verser assez rapidement dans un sentimentalisme assumé, qui, s’il peut toucher certains lecteurs, gênera peut-être d’autres - ces mêmes autres qui regretteront peut-être le peu de densité conceptuelle de l’analyse.
Si le lecteur déjà initié peut effectivement rester sur sa faim, il faut reconnaître le mérite d’une ligne éditoriale qui vise à faire partager avec générosité l’expérience d’Etty, et de proposer une sorte de petite « base de données » sur l’expérience spirituelle de la jeune femme qui sera un bon outil de travail pour ceux qui veulent prendre, un temps, Etty pour maîtresse de vie spirituelle.

Etty Hillesum, histoire de la fille qui ne savait pas s’agenouiller
C. Juliet, D. Sterckx et C. Vigée
éd. Arfuyen 2007.



19 commentaires:

Didier Goux a dit…

Ce nom m'était resté à ce jour inconnu. Je viens de commander le journal.

Catherine a dit…

Je n'ai jamais entendu parlé de Etty Hillesum mais je vois que mon Luminaire Céleste va réparer cette ignorance. Comme quoi, on en apprend des choses sur les blogs !

Sémiramis a dit…

Wahou Didier, je suis plutôt flattée: on dirait que vous me faites une confiance aveugle! J'espère désormais que vous goûterez cette lecture (je me sens une lourde responsabilité!)

Avez-vous lu l'article où je citais un extrait du journal (en hypertexte dans cet article)?

Oui, effectivement, on en apprend des choses sur les blogs, mais surtout on y est en fort bonne société!

Amitiés à vous deux.

Jean-Baptiste Bourgoin a dit…

Je viens de relire ton extrait du journal d'Etty Hillesum, et me voilà en train de mémoriser son nom pour de prochaines lectures. La vie est pleine de découverte !

Sémiramis a dit…

Je pense que cette lecture devrait t'exalter... Il y a de nombreux thèmes communs avec Simone (d'ailleurs j'avais à l'époque un projet d'article il me semble... temous fugit!)

Bonne nuit!

Jean-Baptiste Bourgoin a dit…

"Oui, mon Dieu, tu sembles assez peu capable de modifier une situation finalement indissociable de cette vie."

Oui, c'est ce qu'il me semble.

Projet d'article remis à plus tard ? (Je suis intéressé !)

Jean-Baptiste Bourgoin a dit…

J'allais oublier...

Douce, bonne et heureuse nuit !

Sémiramis a dit…

J'imagine que ça t'intéresse!
Peut-être pourra-t-on se parler demain??
Bonne, belle et douce nuit à toi aussi!

Léopold a dit…

J'ai découvert le nom d'Etty Hillesum ici aussi, mais dans un billet plus ancien où il était aussi question d'Edith Stein... et depuis quelques jours je suis justement en train de lire le fameux Journal. :-) Tu as bien raison d'insister Elise, il s'agit vraiment d'un texte magnifique.

Léopold a dit…

(Arf, j'avais raté le lien hypertexte!)

Sémiramis a dit…

Ah, je suis heureuse de t'avoir fait découvrir cette chère Etty! Tu nous feras un post sur le journal Léopold?

Eh bé voila, suis toute contente moi, alors j'insisterai encore et encore puisque ça marche ;-)

Anonyme a dit…

Ravie que vous parliez d'Etty Hillesum ! Je lis et relis "Une vie bouleversée" depuis des années, sans me lasser. L'ouvrage que vous conseillez aujourd'hui est excellent. Lorsque vous dites à son sujet que "si le lecteur [est] déjà initié [il] peut [...] rester sur sa faim", je ne suis pas d'accord.
Les quatre "commentateurs" - chacun avec une approche particulière - apportent un éclairage complémentaire à une oeuvre vraiment "bouleversante". Sinon, connaissez-vous le livre écrit sur Etty Hillesum (il y a déjà plusieurs années) par Sylvie Germain ?

Sémiramis a dit…

Flore,

Je n'ai pas lu le livre de Sylvie Germain (je n'ai d'ailleurs jamais lu tout court Sylvie Germain, quoiqu'on me l'aie recommandée)!

Peut-être ai-je été trop expéditive sur la critique de ce livre. J'ai lu la rencension d'Etudes qui m'a laissé un doute... Mais en le refeuilletant, je ne suis pas plus convaincue. je le trouve un peu blablateux et trop pathos. Mais notez la touche positive à la fin tout de même ;-)!

Avez-vous ce livre en votre possession? Sinon, je peux vous l'envoyer (cela me ferait plaisir de vous faire plaisir)

Bonne soirée

Anonyme a dit…

Bonsoir Elise,
Un grand merci pour votre aimable proposition mais j'ai acheté l'ouvrage dès sa parution. Je dois dire que je suis fascinée par le personnage d'Etty Hillesum et que je lis presque tout ce qui s'écrit sur elle. (Je n'ai pas beaucoup apprécié celui de Paul Lebeau et le "Portrait d'Etty Hillesum" par Ingmar Granstedt, s'il enrichit la connaissance du personnage, est un peu trop "universitaire" à mon goût).
Pour en revenir à celui que vous commentez, je vais préciser un peu ma pensée. Je trouve qu'il y a un texte qui dépasse de beaucoup les autres, c'est celui de Dominique Sterckx qui, à mon avis, sait parfaitement mettre en valeur les aspects essentiels de la spiritualité d'Etty Hillesum. Cependant, je me demande si ce livre est à conseiller aux personnes qui n'ont pas lu "Une vie bouleversée" car je pense qu'elles risquent fort d'être désorientées par des passages sortis de leur contexte. En effet, l'itinéraire spirituel d'Etty évolue peu à peu au fil des rencontres, des épreuves, et des choix auxquels elle est confrontée. Et il y a - à mon avis - une différence spectaculaire entre la jeune femme du début et celle qui part pour Auschwitz avec pour ultime témoignage ces quelques mots : "le Seigneur est ma chambre haute".
En ce qui concerne Sylvie Germain, elle vient de préfacer un ouvrage que je trouve excellent : "Le chant des profondeurs" qui rassemble des méditations du père bénédictin André Louf, du pasteur Michel Leplay, de Boris Bobrinskoy de l'Institut Saint-Serge, de Claude Vigée et de Larbi Kéchat, recteur d'une mosquée parisienne. Le tout dirigé par Nathalie Nabert, spécialiste entre autres de la spiritualité cartusienne.
Texte de la dernière page de couverture : "Ici se trouvent rassemblées les méditations de personnalités pour qui la rencontre de la Parole divine manifestée dans la Torah, la Bible et le Coran a éveillé l'intériorité, le goût du Dieu des profondeurs, savouré dans la liturgie, la prière et la contemplation". Editions Salvator. Je n'ai pas d'actions chez eux :-)

Catherine a dit…

La factrice vient de m'apporter Etty Hillesum ET Déva ! Je ne sais par où commencer.

Sémiramis a dit…

Catherine,
Avez-vous réussi à partager les précieux livres avec votre luminaire céleste ;-) ?

Je suis bien heureuse de vous avoir communiqué le désir de lire ces deux ouvrages. Bonne lecture!

Sémiramis a dit…

Flore, je suis bien impolie et vous réponds bien tard, pardonnez moi!

De mon côté j'ai été très réticente d'abord à "entrer" dans le journal d'Etty. Les passages de la fin ne me dérangeaient pas: c'était ceux du début qui me choquaient! Ce livre n'est pas évident parce qu'il est à la fois très mystique et à la fois très incarné. Une sorte de Thérèse d'Avila qui aurait fait son marché et qui aurait aimé un type (et même couché avec lui!)...

Je n'ai pas lu d'autres ouvrages sur Etty et suis bien mal placée pour les commenter... mais ce qui m'a un peu déplu dans celui dont il est question, c'est la lourdeur de l'exaltation des auteurs envers elle; j'ai eu l'impression qu'ils en faisaient largement trop et que cela venait surcharger la beauté pure de ses propos à elle. (pour faire du mauvais esprit, si on ne peut conseiller ce livre qu'aux lecteurs d'Etty, je le trouve alors carrément redondant ;-) mais là je vous taquine un peu!)

Le livre de Catherine Clément a l'air effectivement intéressant, à en juger par ce casting éditorial parfaitement adapté à la semaine de l'unité!

Bonnes lectures à vous et à bientôt, amitiés.

Anonyme a dit…

Bonsoir Elise,
Merci d'avoir pris le temps de répondre (je sais à vous lire que vous êtes très occupée). Vous écrivez : "Ce livre n'est pas évident parce qu'il est à la fois très mystique et à la fois très incarné". C'est justement ce qui m'a beaucoup plu !
Amitiés et à bientôt.

Sémiramis a dit…

Effectivement, c'est ce qui fait sa force... Bonne nuit!