07 juin 2007

Un road movie à la française

Grand périple ce week-end: pour rendre honneur à M. Camille qui convolait en justes noces avec Madame Crooke, nous prîmes notre courage à deux mains, la Renault 21 paternelle, et quelques vêtements chics et décadents, attrapâmes au passage Funy Friend arrivant de Tours et Chloé débarquant de la capitale; tous les éléments d'un grand moment de jeunitude bien de notre âge.
Partant d'Orléans pour une destination improbable, à 40 km au sud de Grenoble, nous avions sagement opté pour une étape bourguignonne. Sagement et intelligemment, puisque le but inavoué, outre le juste milieu que représentait cette ville sur notre route, était d'aller visiter les fameux Hospices de Beaune. Ah, ces fameux hospices, immortalisés par l'escapade de Louis de Funès dans La Grande Vadrouille!




Mais le but encore moins avoué, mais secrètement poursuivi avec ardeur, c'est celui-ci:

Le retable du Jugement Dernier, pure merveille renaissante dont je rêvais de contempler l'original depuis qu'Emmanuel Falque m'avait aguichée avec le prologue de Métamorphose de la Finitude.
"Un retable aux Hospices de Beaune dit tout, ou presque, de la "germination des ressuscités". L'art en général, et le peintre Rogier Van der Weyden en particulier, faut voir dans cette oeuvre un mystère que la philosophie et la théologie ont peine à figurer: le "Jugement dernier entendu comme moment de la "Résurrection des corps". [...] la puissance de l'image défie ici toute tentative du concept. Plus que tout autre conjecture artistique ou littéraire, la spécificité de l'image tient davantage dans cette étrange, mais combien juste, métamorphose théologique de la structure philosophique du monde, quand naissent les ressuscités: craquèlement et ouverture de l'immanence et de la temporalité (croûte de notre finitude), indépassable pourtant au niveau de notre simple existence d'hommes (métamorphose). Ni autre monde ni évènement dans le monde, la Résurrection se montre ici sous son vrai jour - comme transformation du monde et de l'homme en lui: évènement ontologique, et non pas ontique"
Métamorphose de la finitude,
liminaire, p. 13-14, éd. du Cerf, Coll. La Nuit Surveillée, 2004.




Cette germination des ressuscités frappe par la violence de ses coloris, la finesse de ses détails. Par l'intensité spirituelle qu'elle exprime avec tant de force. On imagine l'effet hallucinatoire que devait produire le retable sur les malades couchés dans la "Salle des pôvres", qui pouvaient contempler ses ors les dimanches et les jours de fête!
Il vous faut absolument aller contempler ce chef d'oeuvre, mes photos étant bien pauvres, pour cause bien compréhensible d'interdit de flash et d'obscurité... Sinon, procurez vous le splendide ouvrage d'Eliane Gondinet-Wallstein, Un retable pour l'au-delà, Mame.

Rassasiés de cette splendeur, nous repartîmes, et vogue la galère jusqu'à Lyon, où nous dégustâmes quelques spécialités chez l'ami Mc Donald, pour continuer jusqu'à Grenoble où nous découvrons ravis l'entreprise du frère de Chloé, débarquer à l'hôtel et revêtir de splendides et princiers atours, tout ça pour arriver finalement un poil presque à l'heure à Cornillon en Trièves, charmant petit trou perdu peuplé d'autant d'habitants que de bovins, où la cérémonie républicaine se déroulait.
Suivit une soirée magnifiquement rustique où l'hospitalité de nos hôtes nous surprit autant qu'elle nous combla. Un repas pantagruélique, copieusement arrosé, quelques prises de bec politiques entre sarkozystes réalistes et ségolistes utopistes; et une bonne dizaine de macarons plus tard, nous sommes mûrs pour un repos bien mérité. Nous ne pouvions imaginer que le lendemain nous réserverait des émotions beaucoup moins exaltantes. Effectivement, je fus la victime innocente de l'hystérie galopante du couple de gérants de l'hôtel, qui se déchaîna contre moi pour de futiles raisons. Après avoir été menacée verbalement et poussée dans les escaliers (glissants) par la patronne et jetée dehors, moi, petite et faible créature! Que ne regrette-t-on pas d'être née femme de moins d'une mètre soixante quand se déclare contre vous la férocité aveugle de la bêtise. Quoiqu'il en soit, nous repartons atterrés et retrouvons un peu de joie de vivre à Grenoble.
Retour épique avec pause Messe de la Trinité pontifiante et lénifiante à Fourvière, après un circuit découverte lyonnais fort agréable et instructif pour les néophytes de la capitale des Gaulles, des tours et détours désespérants à la recherche de carburant, pause cafèt' à Beaune, et retour au bercail harassés mais heureux, bercés par cette grande traversée, ennivrés par le grisant sentiment de la jeunesse et de la liberté...
Très kerouacquien somme toute, le sexe et la drogue en moins...

24 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonjour Elise

Pour un coup d'oeuil rapide et moins flou : voir la page http://www3.ac-clermont.fr/pedago/arts/bac/retable_beaune.htm# nottament en cliquant sur l'image proposée. Personellement jaime beaucoup ce rétable.

Sémiramis a dit…

Merci beaucoup du lien Eric, et bienvenue à vous sur ces pages!

Effectivement, le site que vous nous donnez permet de contempler le retable dans son ensemble et ses subtilités.

A très bientôt, bonne nuit!

Anonyme a dit…

J'espère que les photos étaient autorisées... Et ben, on se marre bien dans les road movies élyséens :

Sémiramis a dit…

Oui, oui, ne t'inquiète pas Gai Lulu: elles étaient autorisées sans flash! Sinon, je ne les aurais pas faites, voyons.

Ben oui on rigole bien? Ca t'étonne?

Anonyme a dit…

Non non ça ne m'étonne pas du tout ; c'était un mariage tout de même, donc joie joie joie

Sémiramis a dit…

Joie joie joie: mariage ou pas, tel est mon Leitmotiv, et tu le sais bien cher Gai Lulu!

Anonyme a dit…

Mais tu le disais avant de me connaître le "joie joie joie" ?

Anonyme a dit…

Bonsoir Elise,

Je m'achète de suite une paire de lunettes.

Pour voir le retable enfin net.

Sinon, au moins on peut boire. Et pour ça, pas besoin de lunettes.

Sémiramis a dit…

Gai Lulu --> Non, évidemment. C'est l'adage philosophique que tu m'as enseigné, qui est venu conceptualiser pleinement l'expérience de la dilatation spacieuse jusque là non identifiée.

Tschok --> Le site proposé par Eric vous dispensera de lunettes, cher ami, et pour le coup à boire, nous avons bloqué le 26 juin au midi avec Camille.

Anonyme a dit…

Tiens, les road-movies se terminent par " ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants " maintenant ?
Thelma et Louise, où êtes-vous ?

Sémiramis a dit…

Tatianus, mon cher, Thelma et Louise c'es grandiose mais ça finit un peu mal non?
Je reste dans l'illusion naïve d'une vie heureuse (avec un homme de préférence mais bon), alors me casse pas tout!

Anonyme a dit…

Ben oui mais que ce soit Thelma & Louise ou Easy Rider, les road-movies, ça se termine pas souvent bien. Il aurait fallu demander à Frank Capra de s'approprier les codes de Dennis Hopper.

Mais bon, le road-movie conjugual à l'happy-ending, c'est un concept à explorer.

Pour les routes, je verrais bien la Dordogne.
Le réalisateur : euh, Resnais à tout hasard.
Le véhicule : un break ( pour les enfants ).
L'héroïne : toi.
Ici s'arrête ma contribution, je te laisse choisir le héros. Le planisme a ses limites.

Anonyme a dit…

Vous avez pas de mec dans votre road movie?
Ca m'etonne ca quand meme, j'en connais un qui serait faché d'entendre ca...

Sémiramis a dit…

Tatianus --> le road movie conjugal en Dordogne, excellente idée, mais pas assez désertique. Le thème du road movie reprend celui, biblique et éternel, de la traversée du désert... En fait, il vaudrait mieux que l'homme soit au bout de la route, ce serait plus crédible!

Anonyme --> No comment...

Anonyme a dit…

... et n'oubliez pas d'aller voter...hum hum, on m'a recconu? Caramba! Encore raté !

Sémiramis a dit…

:-)

Sémiramis a dit…

Ne t'inquiète pas, va je sais ce que j'ai à faire!

Anonyme a dit…

je disais ca a la cantonnade, je connais votre sens civique, chère Elise-Agathe.
Salut a tous camarades du Possible et du Réel ! Qui les aime suive notre Grande Pretresse !!!
Bon dimanche a tous sur TF/HSQ!

Anonyme a dit…

Ben oui mais quand t'es dans le désert ( comme on disait dans ma jeunesse ), c'est pas super pratique pour se trouver un mec. C'est pour ça que j'avais préféré la Dordogne. Et puis avec le réchauffement climatique...

Sémiramis a dit…

Euh tu es optimiste quant à la quantité de mâles attractifs en Dordogne... Un homme pour 50 châtaigners ça doit être peu près ça. Après, tu enlèves les plus de 40 ans (trop vieux pour moi), il en reste 1 pour mille. Après, tu enlèves...

Non, j'arrête, ce genre de raisonnement va finir par me convaincre d'entrer en religion.

Bonne nuit!

Anonyme a dit…

cher "anonyme",

La gent masculine était bien représentée lors de ce road movie à la kérouac mais uniquement par ton serviteur et Ulrich. Autant dire qu'entre un postulant religieux et son propre frère la pauvre Agathe aurait eu du mal a trouver chaussureà son pied !

Mais que tout ceci ne décourage pas nos lecteurs potentiellement dispnibles !!

Mille baisers à tous,
FF.

Sémiramis a dit…

Tournant Meetic de ce blog... merci FF!

Anonyme a dit…

Oui, navré chère amie, "Meetic" c'est une des facettes "glamour" de ma vocation op !! Ne t'inquiète pas en Septembre, je porte le cilice et le Père-Maître saura remettre de l'ordre et de l'ascèse dans tout ça... Promis, tel que je suis j'essaierai malgré tout de faire un bon religieux !

Ciao tutti !

Sémiramis a dit…

Le cilice??? Arrête de te la péter opusien chéri, ça ne fait rire personne!

Moi, meetic avec les dominicains, ça me va parfaitement, tout cela chastement bien entendu!